à tout ceux qui s'intéressent à mes activités philosophiques,
je leur annonce la cessation à but lucratif .
j'ai décidé de continuer mes activités philosophiques: ateliers , rencontres, conférences philosophiques à but non lucratifs, bénévole et passionnée, j'aimerai faire rencontrer toutes sortes de personnes, jeunes et plus agées, de toutes conditions, de tout milieu, pour échanger, pensées, opinions, arguments et contres exemples, en toute amitié, chère à la philosophie...
Jocelyne Jenny-Pfister
dimanche 26 octobre 2008
dimanche 10 février 2008
lundi 4 février 2008
dimanche 3 février 2008
de l'utilité de la philosophie conférence-débat
débat du 23 janvier 2004 à la Bascule à Sierentz
Thème : De l'utilité de la philosophie
Ou la philosophie au quotidien.
Remerciements aux responsables du service culturels de Sierentz : Mme Rozan , Juan , et leurs collaborateurs ainsi qu'à Angela Pallie
Je me présente à vous : je m'appelle Jocelyne Pfister, je suis née il y a 41 ans dans cette ville de Sierentz, j'habite actuellement à Hagenthal ; je suis la maman d'un garçon de 15 ans; Je vis en couple avec un homme qui a 3 garçons;
Je travaille comme caissière à la Coop à Bâle depuis 14 ans.( où j'ai pu expérimenter quelques facettes de la philosophie ) nous y reviendrons plus tard
Pourquoi le thème de l'utilité de la philosophie ou la philosophie au quotidien ?
Parce qu'elle changé ma vie !
De tout temps je me suis posé plein de questions comme tout enfant, tout adolescent ; j'ai souvent trouvé des réponses dans les livres que le hasard me présentait.
A force de lire, j'ai éprouvé le besoin, le désir d'échanger mes impressions, mes pensées avec d'autres personnes. C'est l'écoute et les encouragements des responsables de la bibliothèque de Huningue qui m'ont permis de créer le premier café-philo en juin 98; L'information de la presse locale, l'Alsace et les DNA , a permis d'agrandir le cercle des participants et avec le bouche à oreille le rdv a perduré jusqu'à ce jour avec l'appui du service culturel de Huningue.
En juin dernier, j'ai commencé un jeux-philo pour les enfants à raison d'une fois par mois, pendant 2 h, nous nous essayons à la discussion libre, joyeuse et respectueuse avec une dizaine d'enfants agés de 6 à 12 ans.( avant de me lancer, j'ai étudié des rapports des iufm sur les pratiques philo en classe dirigé par Michel tozzi qui est professeur des université à Montpellier et que j'ai eu l'occasion de rencontrer lors d'un colloque des café philo en novembre 2002 à Choisy le Grand
Mon rêve à réaliser serait d'organiser, d'animer des ateliers, des débats, des discussions philo, dans les écoles, collèges lycées, centre culturels, bibliothèque et de faire cette activité à temps plein et de pouvoir en vivre.
Avez vous des questions à me poser ?
J'aimerai bien que cette conférence se transforme , en échange avec votre participation .
Nous allons définir dans un premier temps :qu'est ce que la philosophie ?
2ème temps:En quoi est-elle utile pour chacun d'entre nous?
3ème temps : Quels sont les moyens qui sont à notre disposition ?
Qu'est ce que la Philosophie ?
Face à la diversité des définitions que l'on peut trouver, je me tiens à l'étymologie, càd le sens premier du mot qui vient du grec: philos et sophia et qui veut dire : amour de la sagesse.
C'est Pythagore, un grand savant et mathématicien ( 6ème s. av tous les collègiens connaissent le théorème de Pythagore ) qu'on a présenté à un roi comme un savant, un sage; il a répondu : je ne suis pas un sophos (un savant)mais un philosophos: un amant de la sagesse, un chercheur, je la désire (aimer, eros )car je n'en suis pas pourvu .
Une autre définition d'épicure (341-270 av j.c.) nous précise encore que " la philosophie est une activité qui par des discours et des raisonnements nous procure la vie heureuse.
Et dans sa lettre à ménécée :( qui est un disciple d'épicure)
" Que nul, étant jeune, ne tarde à philosopher,ni, vieux, ne se lasse de la philosophie ; car il n'est, pour personne, ni trop tôt, ni trop tard, pour assurer la santé de l'âme; Celui qui dit que le temps de philosopher n'est pas encore venu ou qu'il est passé est semblable à celui qui dit que le temps du bonheur n'est pas encore venu ou qu'il n'est plu ; Il faut donc méditer sur ce qui procure le bonheur, puisque, lui présent, nous avons tout , et, lui absent, nous faisons tout pour l'avoir."
nous notons de ces deux définitions les notions de l'amour, de la sagesse que nous allons développer et rencontrer l'activité qui est aussi la pratique et la vie heureuse ou le bonheur ainsi que la santé de l'âme.
l'amour est à la fois le principal objet de préoccupation des hommes et le moins bien compris. Pour comprendre son essence au delà des préjugés et des confusions habituelles, nous devons oublier nos opinions, laisser les livres et observer notre vie intérieure ; quel est l'élément nécessairement présent dans tout amour, quels qu'en soit la forme, le sujet et l'objet ?
Contrairement à ce que l'on croit, l'amour n'a rien d'irrationnel, il est possible d'en donner une définition à la fois simple, claire et logique.
Que se passe-t-il lorsque nous aimons ?
Même si nous souffrons et avons peur, nous ressentons une émotion agréable; même si nous sommes tristes ou fatigués, lorsque nous aimons, nous éprouvons une amélioration de notre bien être, de notre vitalité, de notre courage; Lorsque nous aimons, nous ressentons une mobilisation de notre énergie intérieure , une satisfaction de tout notre être;
Qu'il soit amour de soi ou d'une personne, de l'argent ou d'une activité, du vin ou de la gloire, d'une œuvre d'art ou d'un enfant, de l'acte sexuel ou de la sagesse, qu'il soit illusoire ou lucide, intense ou léger, total ou partiel ,éphémère ou durable, physique ou intellectuel, l'amour est caractérise par un seul et unique affect, que nous connaissons tous par expérience :la joie, Aimer c'est se "réjouir de ", écrit simplement Aristote (-428--348).
L'amour n'est pas seulement un sentiment plaisant -comme lire un livre agréable ou regarder un programme intéressant à la télé,- c'est aussi une idée, un jugement de l'esprit qui associe une joie à un certain objet supposé en être la source - un exemple : il y a prés de moi, quelqu'un qui me veut du bien , qui est mon amie , qui est à la source de beaucoup de mes joies …
Et je peux dire comme Spinoza (1632-1677) qui a définit l'essence de l'amour ; lorsqu'on dit "je t'aime" cela veut dire
"tu es la source de ma joie, quand je pense à toi, je me réjouis"
et cette déclaration ne demande rien !
(vous pouvez chercher et trouver des exemples dans votre vie quotidienne, réfléchissez…)
nous aimons ce qui nous fait éprouver une certaine joie, une joie totale (gaieté) ou partielle (plaisir), nous l'aimons tant que dure cette joie, et d'autant plus fortement que cette joie est intense et libérée des tristesses, des conflits et des peurs.
Tous nos désirs s'expliquent par cette loi: que nous en soyons conscient ou pas, nous tendons tous naturellement à augmenter notre joie et à diminuer notre tristesse.
Telle est la loi universelle qui commande toute notre vie affective, y compris le désir philosophique ; elle n'admet pas d'exceptions, et c'est d'elle qu'il faut partir pour comprendre philosophie.
Le seul problème de l'amour, c'est qu'il peut être illusoire.
Je peux en effet me tromper et attribuer à une chose séduisante une valeur qu'elle n'a pas.
Les hommes sont malheureux parce qu'ils n'aiment pas ce qui est véritablement bon pour eux et qu'ils se laissent séduire par de faux biens incapable de leur donner le bonheur qu'ils espèrent y trouver ( comme la publicité );
La plupart des gens sont séduits par les plaisirs des sens, les honneurs et les richesses, et ils les désirent avidement.
Mais aucun de ces biens n'est capable de donner une joie pure et constante ( qui pourrait être une définition du bonheur et même de la sérénité ).
Au contraire, le sage est heureux parce qu'il est libéré de toute séduction et qu'il aime tout ce qu'il y a de bon dans la vie, avec la certitude que cela continuera à le combler de bonheur. Le sage est comblé par l'amour de soi et de la vie ; il vit sans manque; habité par le bonheur d'être soi , il se réjouit d'aimer pleinement sa vie dans une relation réelle avec les autres et avec le monde; Il sait aimer selon la sagesse, et tire de là toute sa félicité ( un exemple qui me vient à l'esprit : le dalaï lama )
C'est uniquement pour combler son désir de bonheur que le philosophe désire progresser vers la sagesse; Comme tous les hommes, le philosophe est animé par de multiples désirs, il éprouve de nombreux sentiments d'amour et de haine pour une multitudes d'objets, et il vit dans une relative insatisfaction ; Mais il éprouve aussi un amour intense pour la sagesse, parce qu'il a compris sa valeur suprême pour éviter les pièges de la séduction, développer sa lucidité et obtenir ce qu'il désire le plus dans cette vie;
Philosopher, c'est désirer connaître ce qui est digne d'être aimé pour éloigner les déceptions et augmenter les satisfactions.
Le philosophe ne recherche la connaissance que parce qu'il a compris qu'elle était nécessaire au bonheur et parce qu'il désire se libérer du malheur engendré par l'échec spontané de l'amour ( qui peut être illusoire, nous l'avons entendu avant);
Son amour de la connaissance a pour unique fondement l'amour de soi, l'égoïsme sain ( il faut commencer par soi ), le désir raisonnable de se faire du bien, d'augmenter ses joies.
Cet amour ne dépend que de soi et il n'existe qu'en acte.
Il peut être léger ou intense, mais il est toujours bon, parce qu'il est par définition raisonnable et équilibrant.
Je m'arrête là , on pourrait encore en parler pendant des heures; est ce clair pour tout le monde ? Avez-vous des questions à poser sur cette notion fondamentale de l'amour ?
La sagesse
Qu'est-ce que la sagesse ?
L'idéal d'une vie réussie ?
Non, qu'on aurait réussi dans la vie, ce qui ne serait que carriérisme, mais parce qu'on aurait réussi sa vie elle même;
C'est le but, depuis les grecs, de la philosophie;
Toutefois ce n'est qu'un idéal, dont il importe de se libérer aussi. Le vrai sage n'a que faire de réussir quoi que ce soit: sa vie ne lui importe pas plus , ni moins que celle d'autrui. Il se contente de la vivre, et il trouve un contentement suffisant, qui est la seule sagesse en vérité.
" Pour moi, j'aime la vie" disait Montaigne (1533-1592). C'est en quoi il était sage : parce qu'il n'attendait pas que la vie soit aimable ( facile, agréable, réussie…) pour l'aimer .
Mais nul n'est sage absolument, ni tout entier : tous ont besoin de philosopher, ne serait-ce que pour se déprendre de la philosophie elle même
La sagesse, la vraie sagesse, n'est pas une assurance tous risques, ni une panacée, ni une œuvre d'art; c'est le repos joyeux et libre dans la vérité.
Un savoir ?
Tel est en effet le sens du mot chez les grecs( sophia) mais un savoir très particulier : " la sagesse ne peut être ni une science, ni une technique" disait Aristote : elle porte moins sur ce qui est vrai ou efficace que sur ce qui est bon pour soi et pour les autres ( je vous cite un exemple : pendant la 2ème guerre mondiale, un juif ou un résistant se réfugie prés de chez vous , mais un membre de la gestapo le pourchassant vous demande où il se cache, allez- vous dire la vérité ? ou mentir pour le bien de cet individu ?
Un savoir, certes. Mais c'est un savoir vivre
La sagesse se reconnaît à une certaine sérénité, mais plus encore à une certaine joie, à une certaine liberté, à une certaine éternité (le sage vit au moment présent : il sent et expérimente, comme disait Spinoza, qu'il est éternel) , la sagesse se reconnaît à un certain amour…
" De tous les biens que la sagesse nous procure pour le bonheur de la vie tout entière, soulignait Epicure, l' amitié est de beaucoup le plus grand "
c'est que l'amour propre a cessé de faire obstacle .Que la peur a cessé de faire obstacle. Que le manque a cessé de faire obstacle. Que le mensonge a cessé de faire obstacle;
Il n'y a plus que la joie de connaître, d'apprendre il n'y a plus que l'amour et la vérité; c'est pourquoi nous avons tous nos moments de sagesse, quand l'amour et la vérité nous suffisent . Et de folie, quand ils nous déchirent ou nous fait défauts;
La vraie sagesse n'est pas un idéal, c'est un état tjrs approximatif, c'est une expérience, c'est un acte; Ce n'est pas un absolu, mais un maximum( relatif) c'est le maximum de bonheur, dans le maximum de lucidité; Il dépend de la situation de tel ou tel, des capacité de chacun, bref, il dépend de l'état du monde et de soi .
Ce n'est pas un absolu, c'est la façon , tjrs relative, d'habiter le réel, qui est le seul absolu en vérité; cette sagesse là vaut mieux que tous les livres qu'on a écrits sur elle, qui risquent de nous en séparer.
" Quand bien même nous pourrions être savant du savoir d'autrui, disait Montaigne, au moins sage ne pouvons nous être que de notre propre sagesse"
Nul ne peut vivre à notre place, nul ne peut penser à notre place, nul ne peut aimer à notre place, mais nous pouvons créer notre propre sagesse avec la vie que nous menons, en action, en pratique, avec notre propre réflexion et notre expérience.
En quoi la philosophie est-elle utile ?
Nous avons vu précédemment dans les notions de l'amour et de la sagesse qu'il était beaucoup questions de bonheur ;
Comment y accéder, comment l' atteindre , est-il possible de le vivre ? Ici et maintenant ? ou à quelles conditions ?
Nous avons retenu ce que pouvait être la sagesse : un maximum de bonheur dans le maximum de lucidité; c'est la vie bonne, comme disaient les grecs, mais une vie qui soit humaine, autrement dit responsable et digne .Jouir, Sans doute. Se réjouir ?Le plus qu'on peut. Mais pas n'importe comment. Mais pas à n'importe quel prix. " Tout ce qui donne de la joie est bon " disait Spinoza; toutes les joies ne se valent pas. "Tout plaisir est un bien "disait Epicure; Cela ne veut pas dire que tous les plaisirs méritent d'être recherché, ni même qu'ils soient tous acceptable.Il faut donc choisir, comparer les avantages et les inconvénients, comme disait Epicure, autrement dit Juger. C'est à quoi sert la sagesse. C'est à quoi sert aussi, et par là même, la philosophie. On ne philosophe pas pour passer le temps, ni pour se faire valoir, ni pour faire joujou avec les concepts (notion ) : on philosophe pour sauver sa peau et son âme.
La sagesse est ce salut, non pour une autre vie mais pour celle-ci.
En sommes nous capables ? Pas complètement , sans doute !
Ce n'est pas une raison pour renoncer à nous en rapprocher. Nul n'est sage en entier; mais qui se résignerait à être fou totalement ?
Si tu veux avancer, disaient les stoïciens(Epictète,50-125, Marc Aurèle, 121-180) il faut savoir où tu vas. La sagesse est le but : la vie est le but, mais une vie qui serait plus heureuse, plus lucide; le bonheur est le but, mais qui serait vécu dans la vérité.
Attention pourtant de ne pas faire de la sagesse un idéal de plus, une espérance de plus, une utopie de plus qui nous séparerait du réel ; la sagesse n'est pas une autre vie, qu'il faudrait attendre ou atteindre. Elle est la vérité de notre vie qu'il faut connaître et aimer. Parce qu'elle est aimable , Pas forcément ni toujours ( mieux vaut une vraie tristesse qu'une fausse joie) mais pour qu'elle le devienne.
"La plus expresse marque de la sagesse, disait Montaigne, c'est une éjouissance(?) constante ; son état est comme des choses au dessus de la lune : toujours serein" et aussi bien pourrais-je citer Socrate, Epicure ("Il faut rire tout en philosophant), Descartes (qui a dit je pense, donc je suis), Spinoza, Diderot ou Alain….
Tous ont dit que la sagesse est du coté du plaisir, de la joie, de l'action, de l'amour et que la chance n'y suffit pas.
Ce n'est pas parce que le sage est plus heureux que nous qu'il aime la vie davantage. C'est parce qu'il aime la vie davantage qu'il est plus heureux.
Quant à nous qui ne sommes pas des sages, qui ne sommes que des apprentis en sagesse, c'est à dire des philosophes; il nous reste à apprendre à vivre, à apprendre à penser, à apprendre à aimer; on n'a jamais fini, et c'est pourquoi on a toujours besoin de philosopher.
Cela ne va pas sans efforts, mais cela ne va pas sans joies;
"dans toutes les occupations, écrivait Epicure, la jouissance vient à la suite des travaux acccomplis avec peine; mais en philosophie, le plaisir va du même pas que la connaissance : car ce n'est pas après avoir appris que l'on jouit de ce qu'on sait , mais apprendre et jouir vont ensemble.
Quels sont les moyens à notre disposition ?
C'est par l'intermédiaire de Socrate, qui est nommé encore aujourd'hui le père de la philosophie, que nous allons voir quels moyens disposons nous pour philosopher vraiment.
Qui était Socrate ? (-470-399).
Socrate était un simple citoyen, pauvre et fort laid; socialement, il n'avait rien d'exceptionnel; Ni chef, ni savant, ni mage, Socrate était un homme simple, enjoué et espiègle. Fils d'une sage femme et sans doute sculpteur comme son père, il fut "parmi les hommes de notre temps que nous avons connu, le meilleur et aussi le plus sage et le plus juste" écrit Platon , son plus célèbre disciple. N'ayant rien écrit, on ne connaît pas sa pensée exacte et son personnage reste pour une part légendaire comme ceux de Jesus, Boudha ou Lao Tseu.
Mais la philosophie avait fait de lui un homme sage et heureux; plutôt bon vivant qu'érudit ( quelqu'un qui a beaucoup de connaissances ), Socrate témoignait en toute occasion d'une force d'âme, d'une justice, d'une tempérance et d'un courage exceptionnel. Mais sa sagesse se manifestait surtout dans sa relation aux autres ; Socrate excellait d'un l'art du dialogue. Toute la force de ce sage résidait dans la qualité de sa parole, une parole extraordinairement féconde et puissante. Aimé par de nombreux disciples enthousiastes, redouté par les savant et les gouvernants, Socrate n'enseignait pourtant rien. A la différence de Jesus ou Boudha,, il n'a laissé aucune doctrine. Mais son verbe avait une extraordinaire force d'éveil : il savait faire naître en l'autre le feu sacré de l'amour philosophique, l'amour de la sagesse.
C'était un homme sans spécialité, qui ne revendiquait aucune connaissance particulière. Mais il possédait la connaissance de l'amour " je ne connais que l'amour, affirme Socrate; et l'amour est le désir de posséder toujours le bien "
Quel est le bien désiré par Socrate ?
C'est le bine sensible au corps ( les sensations), l'agréable et tous les plaisirs, mais plus profondément, le bien sensible à l'esprit, le seul capable de combler l'âme : le plaisir lié à l'utile, au vrai, au beau et au juste; le bonheur donné par la sagesse.
Un désir ne vise pas seulement le plaisir, mais l'amélioration, le perfectionnement, l'accomplissement de celui qui l'éprouve, vers le plus haut bonheur … L'amour est le désir joyeux de s'élever vers le bien qui nous manque.
D'où vient l'éveil de Socrate ?
D'une sagesse paradoxale : Socrate possédait la connaissance de son ignorance. Il avait la sagesse de savoir qu'il manquait de sagesse Et cette simple lucidité a changé sa vie
C'est parce que Socrate sait qu'il manque de sagesse qu'il l'a désire. Et ce désir l'a transformé, en transformant son désir : il est devenu philosophe, amant de la sagesse; Il ne désire plus vivre comme la foule sans réflexion, en poursuivant n'importe quel plaisir au gré des passions et des circonstances; Il ne désire plus obéir aveuglément aux impulsions de son corps et aux habitudes de la cité et posséder toujours plus de pouvoirs et de richesses dans une perpétuelle insatisfaction. Il désire obéir au désir le plus profond de son âme, s'approcher des beautés supérieures, par la contemplation des belles choses, des belles actions, des beaux discours et enfin par la connaissance des belles sciences jusqu'à jouir de la beauté la plus haute. L'amour de la sagesse donne le sens de la vie humaine, il est ce par quoi la vie prend son sens Car il n'est de vie sensée que par la pleine réalisation de l'amour.
Mais encore faut-il savoir ce qu'il est bon d'aimer
Encore faut-il connaître ce qui peut combler notre amour.
Or ce n'est pas un amour particulier qu'il importe de réussir, nous dit Socrate. Nous ne devons pas nous attacher à une passion amoureuse déterminée, mais cultiver le grand amour de la vie, de soi et des autres.
Philosopher, c'est éprouver la joie d'utiliser la meilleure partie de son être pour chercher ce qu'il y a de meilleur dans la vie.
Quel est le véritable bien et comment l'atteindre ?
Que dois-je faire pour accomplir l'amour en moi et donner un sens à ma vie ?
Voilà la première et dernière question du philosophe;
Aujourd'hui encore, Socrate continue de nous interroger pour nous faire reconnaître que la vérité de l'amour implique l'amour de la vérité;
Socrate n'enseigne pas une science, il engendre le désir de se connaître soi-même, pour donner un sens à sa vie, à sa recherche incessante du bonheur, car là est le sens de la vie humaine.
Pour continuer sur le chemin de la sagesse, il nous ait donné des outils, des valeurs, des vertus à expérimenter dans notre vie quotidienne qui sont entre autres :
Le courage: capacité de surmonter ses peurs, c'est la force d'âme…
Un homme à l'âme forte lit-on chez Spinoza, "s'efforce de bien faire et de se tenir en joie": confronté aux obstacles, qui sont innombrables, cet effort est le courage même…
La prudence
Est la disposition qui permet de délibérer correctement sur ce qui est bon ou mauvais pour l'homme (non en soi, mais dans le monde tel qu'il est, non en général mais dans telle ou telle situation) et d'agir comme il convient…
La générosité
Etre généreux, c'est être capable de vouloir, explique Descartes, et donc de donner, en effet, quand tant d'autres ne savent que désirer, que demander,, que prendre…
L'humilité( humus, terre)
Une conscience extrême des limites de toute vertu et de soi.
Etre humble , c'est aimer la vérité plus que soi…
La gratitude est un second plaisir, qui en prolonge un premier;
Est le désir par lequel nous nous efforçons de faire du bien à celui qui nous en a fait; elle sait voir en l'autre la cause de sa joie .
Le souvenir joyeux de ce qui fut
La fidélité
La simplicité
La tolérance
La pureté, la douceur , la bonne foi
L'humour ,
Et l'amour qui est la vertus des vertus.
Pour être philosophe, il suffit d'être pleinement soi-même, de reconnaître sans peur son ignorance radicale du mystère de la vie , d'admettre sans orgueil son besoin de savoir, d'assumer sans honte son désir de bonheur; Pour cela il est nécessaire de ne plus tricher, avec les autres, bien sûr mais d'abord avec soi-même. La première vertu philosophique est le courage d'affronter la vérité, à commencer par ce que je suis; un peut-être; un être qui doit reconnaître qu'il manque de sagesse, de science, de bonté, de liberté et de bonheur.
La philosophie est donc toujours une recherche et non une possession. Une activité et non une doctrine. Une réflexion et non un savoir.
Mes sources:
Epicure, lettres et maximes, ed. PUF
Montaigne, Les Essais
André Comte Sponville ,Petit traité des grandes vertus
Et le Dictionnaire Philosophique, ed. PUF
Bruno Giuliani, l'amour de la sagesse, ed. du Relié
Thème : De l'utilité de la philosophie
Ou la philosophie au quotidien.
Remerciements aux responsables du service culturels de Sierentz : Mme Rozan , Juan , et leurs collaborateurs ainsi qu'à Angela Pallie
Je me présente à vous : je m'appelle Jocelyne Pfister, je suis née il y a 41 ans dans cette ville de Sierentz, j'habite actuellement à Hagenthal ; je suis la maman d'un garçon de 15 ans; Je vis en couple avec un homme qui a 3 garçons;
Je travaille comme caissière à la Coop à Bâle depuis 14 ans.( où j'ai pu expérimenter quelques facettes de la philosophie ) nous y reviendrons plus tard
Pourquoi le thème de l'utilité de la philosophie ou la philosophie au quotidien ?
Parce qu'elle changé ma vie !
De tout temps je me suis posé plein de questions comme tout enfant, tout adolescent ; j'ai souvent trouvé des réponses dans les livres que le hasard me présentait.
A force de lire, j'ai éprouvé le besoin, le désir d'échanger mes impressions, mes pensées avec d'autres personnes. C'est l'écoute et les encouragements des responsables de la bibliothèque de Huningue qui m'ont permis de créer le premier café-philo en juin 98; L'information de la presse locale, l'Alsace et les DNA , a permis d'agrandir le cercle des participants et avec le bouche à oreille le rdv a perduré jusqu'à ce jour avec l'appui du service culturel de Huningue.
En juin dernier, j'ai commencé un jeux-philo pour les enfants à raison d'une fois par mois, pendant 2 h, nous nous essayons à la discussion libre, joyeuse et respectueuse avec une dizaine d'enfants agés de 6 à 12 ans.( avant de me lancer, j'ai étudié des rapports des iufm sur les pratiques philo en classe dirigé par Michel tozzi qui est professeur des université à Montpellier et que j'ai eu l'occasion de rencontrer lors d'un colloque des café philo en novembre 2002 à Choisy le Grand
Mon rêve à réaliser serait d'organiser, d'animer des ateliers, des débats, des discussions philo, dans les écoles, collèges lycées, centre culturels, bibliothèque et de faire cette activité à temps plein et de pouvoir en vivre.
Avez vous des questions à me poser ?
J'aimerai bien que cette conférence se transforme , en échange avec votre participation .
Nous allons définir dans un premier temps :qu'est ce que la philosophie ?
2ème temps:En quoi est-elle utile pour chacun d'entre nous?
3ème temps : Quels sont les moyens qui sont à notre disposition ?
Qu'est ce que la Philosophie ?
Face à la diversité des définitions que l'on peut trouver, je me tiens à l'étymologie, càd le sens premier du mot qui vient du grec: philos et sophia et qui veut dire : amour de la sagesse.
C'est Pythagore, un grand savant et mathématicien ( 6ème s. av tous les collègiens connaissent le théorème de Pythagore ) qu'on a présenté à un roi comme un savant, un sage; il a répondu : je ne suis pas un sophos (un savant)mais un philosophos: un amant de la sagesse, un chercheur, je la désire (aimer, eros )car je n'en suis pas pourvu .
Une autre définition d'épicure (341-270 av j.c.) nous précise encore que " la philosophie est une activité qui par des discours et des raisonnements nous procure la vie heureuse.
Et dans sa lettre à ménécée :( qui est un disciple d'épicure)
" Que nul, étant jeune, ne tarde à philosopher,ni, vieux, ne se lasse de la philosophie ; car il n'est, pour personne, ni trop tôt, ni trop tard, pour assurer la santé de l'âme; Celui qui dit que le temps de philosopher n'est pas encore venu ou qu'il est passé est semblable à celui qui dit que le temps du bonheur n'est pas encore venu ou qu'il n'est plu ; Il faut donc méditer sur ce qui procure le bonheur, puisque, lui présent, nous avons tout , et, lui absent, nous faisons tout pour l'avoir."
nous notons de ces deux définitions les notions de l'amour, de la sagesse que nous allons développer et rencontrer l'activité qui est aussi la pratique et la vie heureuse ou le bonheur ainsi que la santé de l'âme.
l'amour est à la fois le principal objet de préoccupation des hommes et le moins bien compris. Pour comprendre son essence au delà des préjugés et des confusions habituelles, nous devons oublier nos opinions, laisser les livres et observer notre vie intérieure ; quel est l'élément nécessairement présent dans tout amour, quels qu'en soit la forme, le sujet et l'objet ?
Contrairement à ce que l'on croit, l'amour n'a rien d'irrationnel, il est possible d'en donner une définition à la fois simple, claire et logique.
Que se passe-t-il lorsque nous aimons ?
Même si nous souffrons et avons peur, nous ressentons une émotion agréable; même si nous sommes tristes ou fatigués, lorsque nous aimons, nous éprouvons une amélioration de notre bien être, de notre vitalité, de notre courage; Lorsque nous aimons, nous ressentons une mobilisation de notre énergie intérieure , une satisfaction de tout notre être;
Qu'il soit amour de soi ou d'une personne, de l'argent ou d'une activité, du vin ou de la gloire, d'une œuvre d'art ou d'un enfant, de l'acte sexuel ou de la sagesse, qu'il soit illusoire ou lucide, intense ou léger, total ou partiel ,éphémère ou durable, physique ou intellectuel, l'amour est caractérise par un seul et unique affect, que nous connaissons tous par expérience :la joie, Aimer c'est se "réjouir de ", écrit simplement Aristote (-428--348).
L'amour n'est pas seulement un sentiment plaisant -comme lire un livre agréable ou regarder un programme intéressant à la télé,- c'est aussi une idée, un jugement de l'esprit qui associe une joie à un certain objet supposé en être la source - un exemple : il y a prés de moi, quelqu'un qui me veut du bien , qui est mon amie , qui est à la source de beaucoup de mes joies …
Et je peux dire comme Spinoza (1632-1677) qui a définit l'essence de l'amour ; lorsqu'on dit "je t'aime" cela veut dire
"tu es la source de ma joie, quand je pense à toi, je me réjouis"
et cette déclaration ne demande rien !
(vous pouvez chercher et trouver des exemples dans votre vie quotidienne, réfléchissez…)
nous aimons ce qui nous fait éprouver une certaine joie, une joie totale (gaieté) ou partielle (plaisir), nous l'aimons tant que dure cette joie, et d'autant plus fortement que cette joie est intense et libérée des tristesses, des conflits et des peurs.
Tous nos désirs s'expliquent par cette loi: que nous en soyons conscient ou pas, nous tendons tous naturellement à augmenter notre joie et à diminuer notre tristesse.
Telle est la loi universelle qui commande toute notre vie affective, y compris le désir philosophique ; elle n'admet pas d'exceptions, et c'est d'elle qu'il faut partir pour comprendre philosophie.
Le seul problème de l'amour, c'est qu'il peut être illusoire.
Je peux en effet me tromper et attribuer à une chose séduisante une valeur qu'elle n'a pas.
Les hommes sont malheureux parce qu'ils n'aiment pas ce qui est véritablement bon pour eux et qu'ils se laissent séduire par de faux biens incapable de leur donner le bonheur qu'ils espèrent y trouver ( comme la publicité );
La plupart des gens sont séduits par les plaisirs des sens, les honneurs et les richesses, et ils les désirent avidement.
Mais aucun de ces biens n'est capable de donner une joie pure et constante ( qui pourrait être une définition du bonheur et même de la sérénité ).
Au contraire, le sage est heureux parce qu'il est libéré de toute séduction et qu'il aime tout ce qu'il y a de bon dans la vie, avec la certitude que cela continuera à le combler de bonheur. Le sage est comblé par l'amour de soi et de la vie ; il vit sans manque; habité par le bonheur d'être soi , il se réjouit d'aimer pleinement sa vie dans une relation réelle avec les autres et avec le monde; Il sait aimer selon la sagesse, et tire de là toute sa félicité ( un exemple qui me vient à l'esprit : le dalaï lama )
C'est uniquement pour combler son désir de bonheur que le philosophe désire progresser vers la sagesse; Comme tous les hommes, le philosophe est animé par de multiples désirs, il éprouve de nombreux sentiments d'amour et de haine pour une multitudes d'objets, et il vit dans une relative insatisfaction ; Mais il éprouve aussi un amour intense pour la sagesse, parce qu'il a compris sa valeur suprême pour éviter les pièges de la séduction, développer sa lucidité et obtenir ce qu'il désire le plus dans cette vie;
Philosopher, c'est désirer connaître ce qui est digne d'être aimé pour éloigner les déceptions et augmenter les satisfactions.
Le philosophe ne recherche la connaissance que parce qu'il a compris qu'elle était nécessaire au bonheur et parce qu'il désire se libérer du malheur engendré par l'échec spontané de l'amour ( qui peut être illusoire, nous l'avons entendu avant);
Son amour de la connaissance a pour unique fondement l'amour de soi, l'égoïsme sain ( il faut commencer par soi ), le désir raisonnable de se faire du bien, d'augmenter ses joies.
Cet amour ne dépend que de soi et il n'existe qu'en acte.
Il peut être léger ou intense, mais il est toujours bon, parce qu'il est par définition raisonnable et équilibrant.
Je m'arrête là , on pourrait encore en parler pendant des heures; est ce clair pour tout le monde ? Avez-vous des questions à poser sur cette notion fondamentale de l'amour ?
La sagesse
Qu'est-ce que la sagesse ?
L'idéal d'une vie réussie ?
Non, qu'on aurait réussi dans la vie, ce qui ne serait que carriérisme, mais parce qu'on aurait réussi sa vie elle même;
C'est le but, depuis les grecs, de la philosophie;
Toutefois ce n'est qu'un idéal, dont il importe de se libérer aussi. Le vrai sage n'a que faire de réussir quoi que ce soit: sa vie ne lui importe pas plus , ni moins que celle d'autrui. Il se contente de la vivre, et il trouve un contentement suffisant, qui est la seule sagesse en vérité.
" Pour moi, j'aime la vie" disait Montaigne (1533-1592). C'est en quoi il était sage : parce qu'il n'attendait pas que la vie soit aimable ( facile, agréable, réussie…) pour l'aimer .
Mais nul n'est sage absolument, ni tout entier : tous ont besoin de philosopher, ne serait-ce que pour se déprendre de la philosophie elle même
La sagesse, la vraie sagesse, n'est pas une assurance tous risques, ni une panacée, ni une œuvre d'art; c'est le repos joyeux et libre dans la vérité.
Un savoir ?
Tel est en effet le sens du mot chez les grecs( sophia) mais un savoir très particulier : " la sagesse ne peut être ni une science, ni une technique" disait Aristote : elle porte moins sur ce qui est vrai ou efficace que sur ce qui est bon pour soi et pour les autres ( je vous cite un exemple : pendant la 2ème guerre mondiale, un juif ou un résistant se réfugie prés de chez vous , mais un membre de la gestapo le pourchassant vous demande où il se cache, allez- vous dire la vérité ? ou mentir pour le bien de cet individu ?
Un savoir, certes. Mais c'est un savoir vivre
La sagesse se reconnaît à une certaine sérénité, mais plus encore à une certaine joie, à une certaine liberté, à une certaine éternité (le sage vit au moment présent : il sent et expérimente, comme disait Spinoza, qu'il est éternel) , la sagesse se reconnaît à un certain amour…
" De tous les biens que la sagesse nous procure pour le bonheur de la vie tout entière, soulignait Epicure, l' amitié est de beaucoup le plus grand "
c'est que l'amour propre a cessé de faire obstacle .Que la peur a cessé de faire obstacle. Que le manque a cessé de faire obstacle. Que le mensonge a cessé de faire obstacle;
Il n'y a plus que la joie de connaître, d'apprendre il n'y a plus que l'amour et la vérité; c'est pourquoi nous avons tous nos moments de sagesse, quand l'amour et la vérité nous suffisent . Et de folie, quand ils nous déchirent ou nous fait défauts;
La vraie sagesse n'est pas un idéal, c'est un état tjrs approximatif, c'est une expérience, c'est un acte; Ce n'est pas un absolu, mais un maximum( relatif) c'est le maximum de bonheur, dans le maximum de lucidité; Il dépend de la situation de tel ou tel, des capacité de chacun, bref, il dépend de l'état du monde et de soi .
Ce n'est pas un absolu, c'est la façon , tjrs relative, d'habiter le réel, qui est le seul absolu en vérité; cette sagesse là vaut mieux que tous les livres qu'on a écrits sur elle, qui risquent de nous en séparer.
" Quand bien même nous pourrions être savant du savoir d'autrui, disait Montaigne, au moins sage ne pouvons nous être que de notre propre sagesse"
Nul ne peut vivre à notre place, nul ne peut penser à notre place, nul ne peut aimer à notre place, mais nous pouvons créer notre propre sagesse avec la vie que nous menons, en action, en pratique, avec notre propre réflexion et notre expérience.
En quoi la philosophie est-elle utile ?
Nous avons vu précédemment dans les notions de l'amour et de la sagesse qu'il était beaucoup questions de bonheur ;
Comment y accéder, comment l' atteindre , est-il possible de le vivre ? Ici et maintenant ? ou à quelles conditions ?
Nous avons retenu ce que pouvait être la sagesse : un maximum de bonheur dans le maximum de lucidité; c'est la vie bonne, comme disaient les grecs, mais une vie qui soit humaine, autrement dit responsable et digne .Jouir, Sans doute. Se réjouir ?Le plus qu'on peut. Mais pas n'importe comment. Mais pas à n'importe quel prix. " Tout ce qui donne de la joie est bon " disait Spinoza; toutes les joies ne se valent pas. "Tout plaisir est un bien "disait Epicure; Cela ne veut pas dire que tous les plaisirs méritent d'être recherché, ni même qu'ils soient tous acceptable.Il faut donc choisir, comparer les avantages et les inconvénients, comme disait Epicure, autrement dit Juger. C'est à quoi sert la sagesse. C'est à quoi sert aussi, et par là même, la philosophie. On ne philosophe pas pour passer le temps, ni pour se faire valoir, ni pour faire joujou avec les concepts (notion ) : on philosophe pour sauver sa peau et son âme.
La sagesse est ce salut, non pour une autre vie mais pour celle-ci.
En sommes nous capables ? Pas complètement , sans doute !
Ce n'est pas une raison pour renoncer à nous en rapprocher. Nul n'est sage en entier; mais qui se résignerait à être fou totalement ?
Si tu veux avancer, disaient les stoïciens(Epictète,50-125, Marc Aurèle, 121-180) il faut savoir où tu vas. La sagesse est le but : la vie est le but, mais une vie qui serait plus heureuse, plus lucide; le bonheur est le but, mais qui serait vécu dans la vérité.
Attention pourtant de ne pas faire de la sagesse un idéal de plus, une espérance de plus, une utopie de plus qui nous séparerait du réel ; la sagesse n'est pas une autre vie, qu'il faudrait attendre ou atteindre. Elle est la vérité de notre vie qu'il faut connaître et aimer. Parce qu'elle est aimable , Pas forcément ni toujours ( mieux vaut une vraie tristesse qu'une fausse joie) mais pour qu'elle le devienne.
"La plus expresse marque de la sagesse, disait Montaigne, c'est une éjouissance(?) constante ; son état est comme des choses au dessus de la lune : toujours serein" et aussi bien pourrais-je citer Socrate, Epicure ("Il faut rire tout en philosophant), Descartes (qui a dit je pense, donc je suis), Spinoza, Diderot ou Alain….
Tous ont dit que la sagesse est du coté du plaisir, de la joie, de l'action, de l'amour et que la chance n'y suffit pas.
Ce n'est pas parce que le sage est plus heureux que nous qu'il aime la vie davantage. C'est parce qu'il aime la vie davantage qu'il est plus heureux.
Quant à nous qui ne sommes pas des sages, qui ne sommes que des apprentis en sagesse, c'est à dire des philosophes; il nous reste à apprendre à vivre, à apprendre à penser, à apprendre à aimer; on n'a jamais fini, et c'est pourquoi on a toujours besoin de philosopher.
Cela ne va pas sans efforts, mais cela ne va pas sans joies;
"dans toutes les occupations, écrivait Epicure, la jouissance vient à la suite des travaux acccomplis avec peine; mais en philosophie, le plaisir va du même pas que la connaissance : car ce n'est pas après avoir appris que l'on jouit de ce qu'on sait , mais apprendre et jouir vont ensemble.
Quels sont les moyens à notre disposition ?
C'est par l'intermédiaire de Socrate, qui est nommé encore aujourd'hui le père de la philosophie, que nous allons voir quels moyens disposons nous pour philosopher vraiment.
Qui était Socrate ? (-470-399).
Socrate était un simple citoyen, pauvre et fort laid; socialement, il n'avait rien d'exceptionnel; Ni chef, ni savant, ni mage, Socrate était un homme simple, enjoué et espiègle. Fils d'une sage femme et sans doute sculpteur comme son père, il fut "parmi les hommes de notre temps que nous avons connu, le meilleur et aussi le plus sage et le plus juste" écrit Platon , son plus célèbre disciple. N'ayant rien écrit, on ne connaît pas sa pensée exacte et son personnage reste pour une part légendaire comme ceux de Jesus, Boudha ou Lao Tseu.
Mais la philosophie avait fait de lui un homme sage et heureux; plutôt bon vivant qu'érudit ( quelqu'un qui a beaucoup de connaissances ), Socrate témoignait en toute occasion d'une force d'âme, d'une justice, d'une tempérance et d'un courage exceptionnel. Mais sa sagesse se manifestait surtout dans sa relation aux autres ; Socrate excellait d'un l'art du dialogue. Toute la force de ce sage résidait dans la qualité de sa parole, une parole extraordinairement féconde et puissante. Aimé par de nombreux disciples enthousiastes, redouté par les savant et les gouvernants, Socrate n'enseignait pourtant rien. A la différence de Jesus ou Boudha,, il n'a laissé aucune doctrine. Mais son verbe avait une extraordinaire force d'éveil : il savait faire naître en l'autre le feu sacré de l'amour philosophique, l'amour de la sagesse.
C'était un homme sans spécialité, qui ne revendiquait aucune connaissance particulière. Mais il possédait la connaissance de l'amour " je ne connais que l'amour, affirme Socrate; et l'amour est le désir de posséder toujours le bien "
Quel est le bien désiré par Socrate ?
C'est le bine sensible au corps ( les sensations), l'agréable et tous les plaisirs, mais plus profondément, le bien sensible à l'esprit, le seul capable de combler l'âme : le plaisir lié à l'utile, au vrai, au beau et au juste; le bonheur donné par la sagesse.
Un désir ne vise pas seulement le plaisir, mais l'amélioration, le perfectionnement, l'accomplissement de celui qui l'éprouve, vers le plus haut bonheur … L'amour est le désir joyeux de s'élever vers le bien qui nous manque.
D'où vient l'éveil de Socrate ?
D'une sagesse paradoxale : Socrate possédait la connaissance de son ignorance. Il avait la sagesse de savoir qu'il manquait de sagesse Et cette simple lucidité a changé sa vie
C'est parce que Socrate sait qu'il manque de sagesse qu'il l'a désire. Et ce désir l'a transformé, en transformant son désir : il est devenu philosophe, amant de la sagesse; Il ne désire plus vivre comme la foule sans réflexion, en poursuivant n'importe quel plaisir au gré des passions et des circonstances; Il ne désire plus obéir aveuglément aux impulsions de son corps et aux habitudes de la cité et posséder toujours plus de pouvoirs et de richesses dans une perpétuelle insatisfaction. Il désire obéir au désir le plus profond de son âme, s'approcher des beautés supérieures, par la contemplation des belles choses, des belles actions, des beaux discours et enfin par la connaissance des belles sciences jusqu'à jouir de la beauté la plus haute. L'amour de la sagesse donne le sens de la vie humaine, il est ce par quoi la vie prend son sens Car il n'est de vie sensée que par la pleine réalisation de l'amour.
Mais encore faut-il savoir ce qu'il est bon d'aimer
Encore faut-il connaître ce qui peut combler notre amour.
Or ce n'est pas un amour particulier qu'il importe de réussir, nous dit Socrate. Nous ne devons pas nous attacher à une passion amoureuse déterminée, mais cultiver le grand amour de la vie, de soi et des autres.
Philosopher, c'est éprouver la joie d'utiliser la meilleure partie de son être pour chercher ce qu'il y a de meilleur dans la vie.
Quel est le véritable bien et comment l'atteindre ?
Que dois-je faire pour accomplir l'amour en moi et donner un sens à ma vie ?
Voilà la première et dernière question du philosophe;
Aujourd'hui encore, Socrate continue de nous interroger pour nous faire reconnaître que la vérité de l'amour implique l'amour de la vérité;
Socrate n'enseigne pas une science, il engendre le désir de se connaître soi-même, pour donner un sens à sa vie, à sa recherche incessante du bonheur, car là est le sens de la vie humaine.
Pour continuer sur le chemin de la sagesse, il nous ait donné des outils, des valeurs, des vertus à expérimenter dans notre vie quotidienne qui sont entre autres :
Le courage: capacité de surmonter ses peurs, c'est la force d'âme…
Un homme à l'âme forte lit-on chez Spinoza, "s'efforce de bien faire et de se tenir en joie": confronté aux obstacles, qui sont innombrables, cet effort est le courage même…
La prudence
Est la disposition qui permet de délibérer correctement sur ce qui est bon ou mauvais pour l'homme (non en soi, mais dans le monde tel qu'il est, non en général mais dans telle ou telle situation) et d'agir comme il convient…
La générosité
Etre généreux, c'est être capable de vouloir, explique Descartes, et donc de donner, en effet, quand tant d'autres ne savent que désirer, que demander,, que prendre…
L'humilité( humus, terre)
Une conscience extrême des limites de toute vertu et de soi.
Etre humble , c'est aimer la vérité plus que soi…
La gratitude est un second plaisir, qui en prolonge un premier;
Est le désir par lequel nous nous efforçons de faire du bien à celui qui nous en a fait; elle sait voir en l'autre la cause de sa joie .
Le souvenir joyeux de ce qui fut
La fidélité
La simplicité
La tolérance
La pureté, la douceur , la bonne foi
L'humour ,
Et l'amour qui est la vertus des vertus.
Pour être philosophe, il suffit d'être pleinement soi-même, de reconnaître sans peur son ignorance radicale du mystère de la vie , d'admettre sans orgueil son besoin de savoir, d'assumer sans honte son désir de bonheur; Pour cela il est nécessaire de ne plus tricher, avec les autres, bien sûr mais d'abord avec soi-même. La première vertu philosophique est le courage d'affronter la vérité, à commencer par ce que je suis; un peut-être; un être qui doit reconnaître qu'il manque de sagesse, de science, de bonté, de liberté et de bonheur.
La philosophie est donc toujours une recherche et non une possession. Une activité et non une doctrine. Une réflexion et non un savoir.
Mes sources:
Epicure, lettres et maximes, ed. PUF
Montaigne, Les Essais
André Comte Sponville ,Petit traité des grandes vertus
Et le Dictionnaire Philosophique, ed. PUF
Bruno Giuliani, l'amour de la sagesse, ed. du Relié
mercredi 23 janvier 2008
l'éducation du citoyen par Michel Sasseville
L’éducation du citoyen
par Michel Sasseville
Créer une communauté de recherche avec les enfants, c'est mettre en route un certain nombre d'activités permettant aux enfants de vivre la démocratie à l'école. Le dialogue n'est pas étranger à ce vécu. En effet, par-delà le pouvoir du vote dans une démocratie, c'est d'abord la capacité de pouvoir échanger entre nous qui crée une démocratie. La démocratie passe par le dialogue, et celui-ci nous ouvre la voie d'une éducation à la citoyenneté.
Apprendre à devenir un démocrate ne se résume pas à l’apprentissage du vote. Le vote n'est que l'aboutissement d'un processus et c’est ce processus qui compte par-dessus tout. Axée sur la délibération, la communauté de recherche philosophique permet à chaque enfant de développer les habiletés et les attitudes d'une personne raisonnable, qualités indispensables pour tout citoyen vivant dans une démocratie. Apprendre la démocratie, c'est apprendre à vivre avec les autres dans le respect des opinions et des raisons avancées par tous et chacun. Si la recherche de consensus n'est pas l'ultime but d'une communauté de recherche, il peut arriver que, par moments, des compromis soient nécessaires.
Dans une communauté de recherche, chacun participe à sa manière au développement de la structure sociale démocratique. Le partage cognitif qui se réalise alors ressemble à celui que nous pourrions avoir si nous nous engagions dans un long processus de réflexion personnelle. Dans un tel cadre, on s'engagera dans une série d'activités mentales afin de pénétrer et d'analyser notre sujet de réflexion. On s'étonnera, on questionnera, on fera des inférences, on définira, on tentera de dégager des présupposés, etc. Dans une communauté de recherche, il se passe la même chose, mais chacun des aspects est pris en charge par l'un ou l'autre des participants. Ainsi, l'un posera une question, un autre formulera une partie du problème qui sera alors repris par l'intervenant suivant, un autre encore signalera la présence d'un présupposé avec lequel il n'est pas d'accord. Il se forme alors une pensée que Lipman qualifie de distributive (le travail cognitif est distribué entre tous) et que chaque enfant de la classe, du fait qu’il y participe, intériorise peu à peu. Parce qu'il est compris dans le même espace qu'elle, l’enfant fait partie de la communauté de recherche; parce qu'il pense avec elle, et surtout par un processus d’intériorisation, c’est peu à peu la communauté de recherche qui fait partie de lui.
Comment pouvons-nous et surtout devons-nous vivre ensemble dans la cité est une question essentielle qui hante l’esprit de l’être humain depuis fort longtemps, peut-être depuis le début. Et elle devient d’autant plus pressante que la vie se complexifie et que les réponses, autrefois fournies par la religion et la politique, semblent parfois faire défaut. En philosophie pour les enfants, rien n’est donné d’avance dans une sorte de vision descendante, selon laquelle il y aurait une réponse déterminée d’en haut à laquelle nous devrions arriver, une réponse immuable, qui finirait par s’imposer à la conscience comme aux conduites humaines. Il s’agit plutôt d’une vision ascendante, selon laquelle, au contraire, tout se joue, se discute et se rediscute à partir de la base. Chemins faisant, cette vision permet cependant de former un citoyen raisonnable.
Créer une communauté de recherche, c'est bâtir une société où chacun, peu à peu, fois après fois, sent de plus en plus l'importance de créer un monde commun où chacun trouve sa place dans le rapport qu’il entretient avec tous les autres. « C'est le monde, disait Jean-Marc Ferry, partagé par ceux qui, éprouvant quelque chose, peuvent comprendre ce qu'ils éprouvent, comprenant ce qu'ils éprouvent, peuvent dire ce qu'ils comprennent et disant ce qu'ils comprennent, peuvent s'entendre sur ce qu'ils disent. » (Les puissances de l'expérience, tome I: le sujet et le verbe. endos de la jaquette) C'est le monde, dirait peut-être Lipman, nous permettant de « franchir l'abîme entre l'étonnement et la réflexion, entre la réflexion et le dialogue, entre le dialogue et l'expérience ». (La découverte d’Harry Sottlemeier, Préface de la traduction française, Vrin, 1977)
Toute démocratie suppose la présence de personnes raisonnables. Être raisonnable ne se réduit pas à être rationnel. Être raisonnable, c'est faire preuve d'une rationalité tempérée par le jugement qui rend nos paroles et nos actes de plus en plus appropriés. Le jugement, et surtout le bon jugement, n'est pas chose si aisée à produire. On n’a pas besoin d’aller à l’école pour apprendre à bien juger. J'ai un voisin qui n'a guère fréquenté l'école, mais qui fait pourtant preuve d'un jugement nuancé. Mais l'école doit aussi participer à la formation de ce jugement, sans quoi elle risque de passer à côté de l'une de ses missions fondamentales : la formation de personnes raisonnables capables de vivre dans une démocratie digne de ce nom.
On s'étonne devant le manque de jugement de certains juges comme si ce problème n’était pas largement répandu dans la population de tous âges et de tous milieux. Même à l'école, on devrait se demander où, quand, comment et par qui se fait la formation du jugement. Car il s’agit là d’une des assises fondamentales de la conscience, de la personne, de la conduite de la vie, de la démocratie et des rapports humains de tous ordres.
Quand on aura admis la nécessité de travailler à la formation du petit de l'être humain en tant que personne, on reconnaîtra du même coup la pertinence de la philosophie pour les enfants. Cette approche sera alors considérée très sérieusement, car on reconnaîtra en elle un instrument approprié pour les buts poursuivis : la formation d'une personne, d'un sujet pensant, agissant, autonome et capable de vivre dans une société démocratique, libérée des chaînes du totalitarisme de ceux qui veulent faire croire qu'une personne éduquée se mesure par la somme des certitudes qu'elle possède, qu'il n'y a qu'un seul point de vue qui doit être retenu, parce que vrai, c'est-à-dire le leur.
Quoi qu'il en soit, pour que le totalitarisme du «point de vue unique» disparaisse, pour que le silence des opprimés devienne le souvenir d'une époque révolue, il faudra d'abord supposer que l'expansion de la démocratie exige une éducation à la démocratie. Ainsi, on sera peut-être mieux préparé à reconnaître alors que l'approche de philosophie pour les enfants représente un instrument fort utile en éducation, parce qu'elle est essentiellement une pratique continue de la démocratie à l'école.
Mais, il faudra aussi accepter, comme la charte des droits de l'enfant le stipule, que l'enfant a un droit de parole et la liberté de penser. Alors, on verra peut-être comment l'approche de philosophie pour les enfants s'appuie sur ces deux piliers fondamentaux permettant la libération des enfants.
Michel SassevilleQuébec, janvier 2005www.ulaval.ca/philoenfant
par Michel Sasseville
Créer une communauté de recherche avec les enfants, c'est mettre en route un certain nombre d'activités permettant aux enfants de vivre la démocratie à l'école. Le dialogue n'est pas étranger à ce vécu. En effet, par-delà le pouvoir du vote dans une démocratie, c'est d'abord la capacité de pouvoir échanger entre nous qui crée une démocratie. La démocratie passe par le dialogue, et celui-ci nous ouvre la voie d'une éducation à la citoyenneté.
Apprendre à devenir un démocrate ne se résume pas à l’apprentissage du vote. Le vote n'est que l'aboutissement d'un processus et c’est ce processus qui compte par-dessus tout. Axée sur la délibération, la communauté de recherche philosophique permet à chaque enfant de développer les habiletés et les attitudes d'une personne raisonnable, qualités indispensables pour tout citoyen vivant dans une démocratie. Apprendre la démocratie, c'est apprendre à vivre avec les autres dans le respect des opinions et des raisons avancées par tous et chacun. Si la recherche de consensus n'est pas l'ultime but d'une communauté de recherche, il peut arriver que, par moments, des compromis soient nécessaires.
Dans une communauté de recherche, chacun participe à sa manière au développement de la structure sociale démocratique. Le partage cognitif qui se réalise alors ressemble à celui que nous pourrions avoir si nous nous engagions dans un long processus de réflexion personnelle. Dans un tel cadre, on s'engagera dans une série d'activités mentales afin de pénétrer et d'analyser notre sujet de réflexion. On s'étonnera, on questionnera, on fera des inférences, on définira, on tentera de dégager des présupposés, etc. Dans une communauté de recherche, il se passe la même chose, mais chacun des aspects est pris en charge par l'un ou l'autre des participants. Ainsi, l'un posera une question, un autre formulera une partie du problème qui sera alors repris par l'intervenant suivant, un autre encore signalera la présence d'un présupposé avec lequel il n'est pas d'accord. Il se forme alors une pensée que Lipman qualifie de distributive (le travail cognitif est distribué entre tous) et que chaque enfant de la classe, du fait qu’il y participe, intériorise peu à peu. Parce qu'il est compris dans le même espace qu'elle, l’enfant fait partie de la communauté de recherche; parce qu'il pense avec elle, et surtout par un processus d’intériorisation, c’est peu à peu la communauté de recherche qui fait partie de lui.
Comment pouvons-nous et surtout devons-nous vivre ensemble dans la cité est une question essentielle qui hante l’esprit de l’être humain depuis fort longtemps, peut-être depuis le début. Et elle devient d’autant plus pressante que la vie se complexifie et que les réponses, autrefois fournies par la religion et la politique, semblent parfois faire défaut. En philosophie pour les enfants, rien n’est donné d’avance dans une sorte de vision descendante, selon laquelle il y aurait une réponse déterminée d’en haut à laquelle nous devrions arriver, une réponse immuable, qui finirait par s’imposer à la conscience comme aux conduites humaines. Il s’agit plutôt d’une vision ascendante, selon laquelle, au contraire, tout se joue, se discute et se rediscute à partir de la base. Chemins faisant, cette vision permet cependant de former un citoyen raisonnable.
Créer une communauté de recherche, c'est bâtir une société où chacun, peu à peu, fois après fois, sent de plus en plus l'importance de créer un monde commun où chacun trouve sa place dans le rapport qu’il entretient avec tous les autres. « C'est le monde, disait Jean-Marc Ferry, partagé par ceux qui, éprouvant quelque chose, peuvent comprendre ce qu'ils éprouvent, comprenant ce qu'ils éprouvent, peuvent dire ce qu'ils comprennent et disant ce qu'ils comprennent, peuvent s'entendre sur ce qu'ils disent. » (Les puissances de l'expérience, tome I: le sujet et le verbe. endos de la jaquette) C'est le monde, dirait peut-être Lipman, nous permettant de « franchir l'abîme entre l'étonnement et la réflexion, entre la réflexion et le dialogue, entre le dialogue et l'expérience ». (La découverte d’Harry Sottlemeier, Préface de la traduction française, Vrin, 1977)
Toute démocratie suppose la présence de personnes raisonnables. Être raisonnable ne se réduit pas à être rationnel. Être raisonnable, c'est faire preuve d'une rationalité tempérée par le jugement qui rend nos paroles et nos actes de plus en plus appropriés. Le jugement, et surtout le bon jugement, n'est pas chose si aisée à produire. On n’a pas besoin d’aller à l’école pour apprendre à bien juger. J'ai un voisin qui n'a guère fréquenté l'école, mais qui fait pourtant preuve d'un jugement nuancé. Mais l'école doit aussi participer à la formation de ce jugement, sans quoi elle risque de passer à côté de l'une de ses missions fondamentales : la formation de personnes raisonnables capables de vivre dans une démocratie digne de ce nom.
On s'étonne devant le manque de jugement de certains juges comme si ce problème n’était pas largement répandu dans la population de tous âges et de tous milieux. Même à l'école, on devrait se demander où, quand, comment et par qui se fait la formation du jugement. Car il s’agit là d’une des assises fondamentales de la conscience, de la personne, de la conduite de la vie, de la démocratie et des rapports humains de tous ordres.
Quand on aura admis la nécessité de travailler à la formation du petit de l'être humain en tant que personne, on reconnaîtra du même coup la pertinence de la philosophie pour les enfants. Cette approche sera alors considérée très sérieusement, car on reconnaîtra en elle un instrument approprié pour les buts poursuivis : la formation d'une personne, d'un sujet pensant, agissant, autonome et capable de vivre dans une société démocratique, libérée des chaînes du totalitarisme de ceux qui veulent faire croire qu'une personne éduquée se mesure par la somme des certitudes qu'elle possède, qu'il n'y a qu'un seul point de vue qui doit être retenu, parce que vrai, c'est-à-dire le leur.
Quoi qu'il en soit, pour que le totalitarisme du «point de vue unique» disparaisse, pour que le silence des opprimés devienne le souvenir d'une époque révolue, il faudra d'abord supposer que l'expansion de la démocratie exige une éducation à la démocratie. Ainsi, on sera peut-être mieux préparé à reconnaître alors que l'approche de philosophie pour les enfants représente un instrument fort utile en éducation, parce qu'elle est essentiellement une pratique continue de la démocratie à l'école.
Mais, il faudra aussi accepter, comme la charte des droits de l'enfant le stipule, que l'enfant a un droit de parole et la liberté de penser. Alors, on verra peut-être comment l'approche de philosophie pour les enfants s'appuie sur ces deux piliers fondamentaux permettant la libération des enfants.
Michel SassevilleQuébec, janvier 2005www.ulaval.ca/philoenfant
mardi 22 janvier 2008
pourquoi faire de la philosophie avec les enfants ?
Sommaire
Qu’est-ce faire de la philosophie avec les enfants ?
Comment se passe une séance de philosophie avec les enfants ?
Qu’apprennent-ils lors d’une Communauté de Recherche Philo. ?
( habiletés et dispositions)
Quels sont les enjeux de cette pratique philosophique ?
Quels sont les moyens actuels pour développer cette pratique ?
Les enfants possèdent des habiletés naturelles à philosopher,
Comme l’étonnement, la curiosité, ils réfléchissent …
La philosophie peut-elle leur permettre de développer leurs capacités à réfléchir, à analyser à comparer, à critiquer ( passer au crible), à justifier et à étoffer leurs arguments, à se soucier des autres et à se dépasser ?
Car apprendre à penser ( de plus en plus juste) est fondamental.
L’excellence de la pensée, facteur de réussite sociale et de bonheur individuel est le meilleur garant de la qualité de la vie et de la démocratie.
Et le citoyen se forme dès la prime enfance.
Qu’Est-ce faire de la philosophie avec les enfants ?
Qui d’entre vous , parents, enseignants, animateurs, éducateurs n’a pas entendu une question d’enfants et d’adolescents ?
Quelques exemples :
- Quand je serai grande, je pourrai penser comme je veux ?
- Où va-t-on aprés la mort ?
-
La philosophie consiste à poser,d’une manière honnête et vraie, les questions les plus simples sur ce qu’il convient d’appeler le sens de la vie, les questions de tout le monde.
Les enfants sont naturellement philosophes; par l’étonnement, base de la philosophie,par leur questionnement, leur curiosité.
Encore faut-il ne pas étouffer dans l’œuf cette soif de savoir, de comprendre ; notre vie actuelle ne nous donne pas toujours le temps de chercher , de trouver des réponses quand il y en a..
On ne sait pas comment s’y prendre avec leurs questions qui peuvent nous désarçonnées
La philosophie, est une passerelle pour accompagner les enfants non seulement dans leurs questionnements mais aussi dans leur formation du jugement, càd discerner correctement ce qui est juste de ce qui ne l’est pas. Cette compréhension présuppose la capacité de bien penser, de délibérer.
C’est l’objectif premier de la philosophie pour enfants telle qu’elle a été développée aux Etats-Unis par Matthew Lipman dans les années 70,
Le développement de la pensée critique, le fait de pouvoir penser par soi-même et de bien penser, càd la formation d’une jugement autonome, à partir de critères réfléchis .
Comment se passe une séance de philosophie avec les enfants ?
Qu’Est-ce qu’une Communauté de Recherche Philosophique ?
Faire de la philosophie avec les enfants consiste d’abord à transformer la classe en communauté de recherche où la parole est d’abord et avant tout donné aux enfants. On y entendra des enfants ou des adolescents qui se parlent. Cependant, il n’est pas rare aujourd’hui d’entrer dans une école et d’y voir des jeunes en train de se parler à propos d’un sujet qui les intéresse. Et on ne dira pas pour autant qu’ils sont en train de transformer leur classe en communauté de recherche.
A première vue, donc rien de neuf sous le soleil, puisque certains affirment qu’ils le font déjà.
Facile à accomplir aussi, car inviter les enfants à parler, c’est répondre à l’un de leurs désirs fondamentaux. Les enfants aiment parler, aiment se dire entre eux des choses qui les intéressent. Cela semble d’ailleurs répondre à un désir humain largement partagé: celui d’échanger, d’interagir avec d’autres humains dans un contexte où le sens, la signification, devient de plus en plus un élément clef pour comprendre ce qui s’y passe. Pas étonnant que les enfants comme les adultes, aient un goût si développé pour se dire des choses entre eux, lorsqu’on songe au fait que le pouvoir de parler avec d’autres êtres humains, c’est le pouvoir de comprendre et de partager le sens que l’on donne à son existence.
Encore faut-il voir ce qui se cache sous la surface de l’ « aimer parler ensemble »
Quand on est devant une communauté de recherche et qu’on décide de dépasser ce premier temps de l’observation , on découvre une structure, un ensemble de relations, d’outils, de moyens permettant d’atteindre des objectifs bien précis.Ces objectifs, à leur tour, sont déterminés par un but ultime : celui d’aider les enfants à développer leur habileté à juger d’une manière raisonnable, d’une manière à la fois critique et créatrice.
Rien de banal, rien de facile non plus, car si cette transformation répond à un désir profond des enfants, encore faut-il ajouter quelle implique l’engagement de personnes en train d’intérioriser une multiplicité d’habiletés cognitives _ habileté à raisonner, à rechercher, à organiser l’information, à traduire _ et un ensemble de dispositions affectives comme le respect, l’écoute, l’entraide, la collaboration , etc dont le nombre, la complexité et l’orchestration apparaissent pourtant nécessaire si on souhaite réaliser de plus en plus pleinement le but poursuivi :
Aider les enfants à penser par et pour eux-mêmes.
Premiers moments d’une communauté de recherche
La disposition en cercle permet un meilleur partage de la voix que les rangées de pupitres traditionnelles. Ce partage commence par la lecture d’une histoire philosophique écrite pour les enfants. En lisant une histoire, les enfants découvrent que celle-ci a un sens, est riche de signification . Qui plus est, elle colle à leur réalité, elle offre des idées sur la façon dont-ils peuvent s’y prendre pour donner un sens à leur expérience, elle suggère des questions qui pourront devenir, à l’occasion, les questions des enfants de la classe;
C’est dire, du même coup l’importance que ce programme accorde à la lecture, son rôle premier n’est pas d’amener les enfants à mieux lire
( bien que ce soit là une conséquence inévitable de l’exercice), mais de les conduire à vivre une première situation d’échange, celle de partager un texte, premier pas dans un processus qui, plus tard, les amènera à échanger et à partager leurs questions, leurs idées, leurs points de vue et leurs sentiments à propos d’une question ou d’un problème que la lecture du texte aura suscité.
La cueillette de questions.
Une fois la lecture terminée, les enfants sont invités à formuler les questions que la lecture a pu susciter. Ce sont les enfants qui donnent le point de départ de l’enquête par les questions qu’ils posent. Partant de l’intérêt des enfants, ces questions traduisent aussi leurs ignorance, leur étonnement. Pratiquer la philosophie avec les enfants, c’est ouvrir la porte à l’étonnement, à la reconnaissance de sa propre ignorance parce qu’on est faillible, au besoin d’aide qu’on pourrait avoir et à l’aide qu’on pourrait offrir en participant à la construction du projet. L’animatrice prendra soin d’inscrire les questions des enfants au tableau. Ele aura le souci d’inscrire le nom de l’enfant qui a posé la question .
La question, pont de départ de la rencontre, est un élément pédagogique fondamental dans la pratique de la philosophie avec les enfants. Les guides pédagogiques qui accompagnent chacun des romans présentent deux composantes principales : les plans de discussion (qui servent principalement à la clarification de concepts) et les exercices ( qui visent le développement d’habiletés intellectuelles ). L’unité de base dans les deux cas est la question. Or, certaines des questions que nous posons ne visent pas simplement à trouver des réponses, mais aussi et peut être surtout à connaître l’ampleur du problème quelles sous tendent. La question de départ est donc l’occasion d’engager les enfants dans une pratique dirigée visant à découvrir, dans une zone particulière de la réalité, le ou les problèmes quelle sous-tend.
La discussion
Les idées et questions sont retenues en raison de leur importance significative pour les enfants. La cueillette d’idée _ la mise sur pied de l’ordre du jour _ est une œuvre collective appelant chaque participant à exposer aux autres soit l’idée, soit le thème, le passage ou la question qui présente un intérêt à ses yeux. Chacun de ces éléments formera un pont entre les intérêts des enfants et les différentes pistes de recherche que proposeront les plans de discussion au moment où ils seront introduits dans la troisième partie du processus : la discussion en communauté de recherche.
Enfin, les enfants s’engagent dans la discussion de l’un, de plusieurs ou de l’ensemble des thèmes, questions ou problèmes qu’ils ont choisis d’investiguer. La pratique de la philosophie avec les enfants permet de développer les habiletés de pensée de ces derniers; Elle leur offre la possibilité de réfléchir philosophiquement à des idées qui les intéressent dans le cadre d’une recherche commune fondée sur la coopération et le dialogue.
Mais ce processus ne se résume pas uniquement à l’exercice des habiletés intellectuelles. En effet, le dialogue suscite une dynamique permettant la création d’une communauté de recherche, laquelle favorise une prise de conscience de ses propres sentiments et de ceux des autres, un accroissement de la sensibilité aux relations interpersonnelles et l’acquisition d’un juste sens des proportions conduisant à faire la part des choses entre ses propres besoins et aspirations et ceux des autres. La discussion est donc un lieu où s’intègrent des apprentissages qui sont de l’ordre du savoir (le sujet de discussion ) du savoir-faire ( les habiletés de pensée ) et du savoir-être ( les attitudes permettant l’émergence de l’impartialité, de l’objectivité, de l’écoute attentive …).
Le rôle de l’animateur
Au moment de créer une communauté de recherche avec les enfants, le rôle de l’animateur n’est pas de fournir l’information ni de produire la
« bonne » opinion ou interprétation. Cette non-directive quant au choix des idées à discuter et au contenu de la discussion vise à assurer que les thèmes choisis correspondent adéquatement aux intérêts des enfants, et non à ceux de la personne qui anime la communauté de recherche. Elle vise ainsi à le prémunir de toute tentation visant à endoctriner les enfants.
La réflexion philosophique concerne d’abord l’émergence d’un questionnement et le dévoilement d’aspects permettant de mieux comprendre le réel, l’existence, le savoir lui-même, l’humain. Elle n’a pas à fournir de réponses toutes faites.
Mais puisque la discussion ne se résume pas simplement à la mise en commun d’opinions et qu’elle vise surtout à enrichir les opinions exprimées, à rechercher la complémentarité des points de vue, à découvrir les idées qui se cachent sous certaines expressions, à clarifier le sens d’une tentative infructueuse, à s’exercer à l’expression d’une pensée à la fois convergente et divergente, à fonder nos représentations,
Il incombe à l’animateur de prendre la responsabilité de créer des initiatives qui guideront et donneront une certaine direction à la recherche afin qu’elle se réalise d’une façon raisonnée qui soit de plus en plus productive et de plus en plus autocorrective. Dans cet ordre d’idées, un certain nombre de stratégies pédagogiques _ qui relèvent aussi de la méthodologie philosophique _ peuvent être utilisées par la personne qui facilite la discussion philosophique dans une comunauté de recherche. Ces outils sont acquis lors de la formation .
Qu’apprennent les enfants lors d’unecommunauté de recherche Philo. ? ( habiletés et dispositions)
Habiletés cognitives
Le programme de philosophie pour les enfants ne cherche pas à favoriser le développement d’une habileté de la pensée au détriment des autres. Car c’est l’excellence dans la pensée qui est visée . Or, celle-ci n’est pas l’affaire d’une habileté en particulier, mais de son emploi approprié. Par conséquent, toutes les habiletés de la pensée doivent être introduites dans un programme visant le développement intellectuel. Chacun peut , à sa manière, si elle est bien employé au moment qui convient, servir pour atteindre cette excellence.
De plus, même si la liste des différentes habiletés intellectuelles semble sans fin et comporter une part d’arbitraire, il est tout de même possible d’en saisir les racines en dégageant ce qui paraît constituer des processus intégrateurs : raisonner, recherche, définir et traduire.
Raisonner
Si on apprend à penser en pensant, de même on apprend à raisonner en raisonnant. Lorsque les enfants sont engagés dans la discussion, ils sont invités à produire un ensemble de raisonnement qui feront l’bjet d’une évaluation constante par l’animateur, par l’enseignant, afin de déceler les éléments du raisonnement qui semblent défectueux et qui mériteraient un exament plus aprofondi . Pour aider l’enseignant dans cette démarche, le programme lui fournit un guide pédagogique remplis d »exercice visant le raffinement de l’activité de raisonner, tels que : l’inférence immédiate,
La conversion, l’inclusion, l’exclusion: la relation entre tout et seulement; le carré d’opposition etc…
En outre, ces guides pédagogiques proposent une série d’exercice permettant de pratiquer un ensemble d’habiletés logiques qu’il faudrait qualifier ici d’informelles : l’ambiguité sémantique, syntaxique; la métaphore; le raisonnement analogique; l’induction; la généralisation ; les présupposés; la classification; différence de degré, de nature; la définition; l’utilisation de l’exemple et du contre exemple; raison et conclusion ; raison et croyance; raison et excuse, raison et but ;les bonnes raisons, les sophismes, l’appel à l’autorité; la flatterie etc…
Toutes ces activités feront l’objet d’une pratique et d’une évaluation qui permettront de corriger le tir au besoin. Elles pourront ainsi, être intériorisées et constituer une seconde nature pour la personne qui les exerce et les maîtrise.
Rechercher
Lorsque les enfants font de la philosophie, leur activité ne se résume pas à raisonner. En effet, au sein d’une communauté d’enquête, leur activité de raisonner s’inscrit dans un mouvement plus large qui st celui de la recherche.Dans le 1er chapitre du 1er roman écrit par Lipman , on y découvre le paradigme (base ) des différentes étapes du processus d’enquête : Harry, le personnage principal du roman éprouve une difficulté ; puis il se met à douter ; il définit le problème qui le tracasse ; il formule une hypothèse permettant de solutionner ce problème ; il met en évidence les conséquences de cette solution sur le plan théorique ; il découvre un contre-exemple qui remet en cause la solution qu’il avait imaginé ; il révise son hypothèse afin de tenir compte des nouveaux faits observés ; il applique finalement son hypothèse révisée à une situation particulière. Chacune de ces étapes est reprise dans l’histoire et appliquée à des situations différentes ,invite les enfants qui la lisent à définir des problèmes, à formuler des hypothèses à imaginer des contre exemples, à dégager des conséquences, en somme à s’exercer aux procédures de la recherche.
Définir
Les philosophes cherchent à préciser le sens des critères qui gouvernent nos actions, nos discours, nos productions. Ils sont particulièrement intéressés à clarifier et à élucider des questions controversées. Or ce faisant, la philosophie propose un ensemble d’idées et de problèmes fondamentaux qui présentent un intérêt considérable aux yeux de ceux qui envisagent de les définir. Et cet intérêt est extrêmement important. Il est un des facteurs qui expliquent la pertinence de la philosophie dans un effort visant l’amélioration de cette habileté qui consiste à organiser l’information, à analyser les objets de notre pensée, en un mot à définir.
En effet la pratique de l’art de définir ne peut suffire pour transformer des personnes qui pensent en des personnes qui pensent bien. Encore faut-il qu’elles pensent à propos de sujets qui présentent une importance à leurs yeux.Si tel n’est pas le cas, non seulement, elles ne seront pas motivés à s ‘engager dans la pratique des habiletés particulières qui sont en jeu ( catégoriser, diviser, distinguer, exemplifier etc…), mais en plus, elles risquent de demeurer avec l’impression, si jamais elles s »engagent à les pratiquer, que ces habiletés peuvent servir à tout et à n’importe quoi et qu’au fond elles ne mènent à rien.
Traduire
Une pensée de qualité supérieure implique la capacité de compréhension.
Puisque le développement de cette pensée se réalise, du moins en philosophie pour les enfants, au sein d’un dialogie, il sera important que chaque interlocuteur puisse traduire en ses propres mots ce qu’il entend de la bouche des autres participants. La traduction, l’interprétation, rend celui ou celle qui pense plus apte à saisir dans ses propres termes ce qui est pensé. Dans la mesure où chaque personnellement son propre langage, l’opération de traduction s’avère indispensable et lui offre la possibilité de mieux comprendre n’importe quel écrit ou communication verbale en facilitant la conversion de cette communication dans des mots, des termes, des expressions et des structures de son langage.
Les processus en jeu dans la traduction sont essentiellement au nombre de deux : le raisonnement analogique et la standardisation.
Une analogie est une ressemblance entre deux relations. Par conséquent, celui qui est capable de construire et de critiquer des analogies devrait posséder la compréhension de reconnaître des ressemblances entre ds passages littéraires différents, ou encore entre des structures langières différents. De son coté, la standardisation permettrait de reconnaître diverses expressions comme étant des façons différents d’exprimer la même chose;
Dispositions
Les dispositions pourraient être définies comme des réponses individuelles aux qualités des interactions sociales qui ont cours dans une situation de groupe. Et devant ces qualités, deux choix sont possibles : ou bien la personne intériorise ces qualités ou bien elle développe une attitude négative à leur endroit. Intérioriser les qualités d’une communauté de recherche, c’est s’engager de plus en plus à s’étonner, à être inquisiteur, à être critique, à interroger les possibles, à prendre soin des outils d’enquête, à coopérer intellectuellement, à respecter les autres et à sentir un désir pour des principes, des idéaux, des raisons,des explications.
Ces dispositions nomment des manières d’être avec les autres et avec soi-même.
Quels sont les enjeux de cette pratique philosophique ?
Au niveau de l’enfant
Dans la pratique de la philosophie avec les enfants se dégage l’idée que la formation de la personne passe aussi par la formation de la pensée et que celle-ci ne saurait s’accomplir sans qu’on prenne le temps d’engager les enfants dans le processus qui la caractérise essentiellement : la recherche . Un enseignement qui viserait uniquement à transmettre les résultats du savoir et qui oublierait d’engager les enfants dans le processus menant à ces résultats est un vain effort.
Si on veut conduire les enfants à mieux penser (pas seulement plus, mais mieux), si on accepte l’idée que l’objectif de l’éducation est de rendre les enfants capables de penser par et pour eux-mêmes, alors il importe qu’ils s’engagent personnellement dans l’acte de penser et construisent ainsi, avec le temps et la répétition, la puissance de produire eux-mêmes les résultats. Comme on apprend à marcher en marchant, on apprend à penser en pensant. Dans les deux cas, ce qui est central, c’est le mouvement.
Un mouvement, dira Lipman, ressemblant à celui du voilier qui, naviguant d’une rive à l’autre, progresse vers sa destination finale.
L’intérêt de cette métaphore tient en partie dans l’idée que la pensée d’un enfant, comme celle de tout être humain, bien qu’essentiellement libre, ne l’est pas entièrement. Losqu’on conduit les enfants à s’engager dans un processus de recherche, on les invite du même coup à tenir compte des vents et marées qui sont le lot de tout processus de recherche. En outre, l’important ici n’est pas tant la destination que le voyage lui-même, car c’est surtout par lui qu’on apprend.
Ce qu’on y apprend, c’est le pouvoir de naviguer de plus en plus habilement dans des conditions inattendues qui, pour être affrontés avec succès, exigent la présence d’un navigateur sachant faire preuve d’un jugement approprié.
C’est pour cela, aussi et peut être surtout que les voyages forment la jeunesse.
La recherche éthique
( l’éthique : vision d’une manière de vivre ou de faire qui soit bonne , heureuse )
Les enfants sont préoccupés par des questions qui touchent leur manière de vivre ensemble. Ils ne veulent pas seulement savoir dans quel monde ils vivent. Ils sont aussi préoccupés de savoir dans quelle sorte monde de monde il ferait non vivre. Une communauté de recherche st n lieu où nous apprenons à vivre ensemble et un lieu où il fait bon vivre.
L’enquête éthique porte principalement sur cette question fondamentale :
Dans quel sorte de monde voulons-nous vivre ?
Qu’avons-nous besoin de faire et qu’avons- nous le droit de faire pour qu’un tel monde advienne ? En philosophie pour les enfants, la recherche éthique ne se fait pas en solitaire. Inscrite dans une communauté de recherche, elle s’effectue en lien avec d’autres personnes qui partagent des objectifs similaires, qui échangent de l’information, qui respectent le point de vue et les opinions d’autrui et qui ont envie de construire une conception raisonnable des modes de vie, une conception dont on puisse dire : ah voici comment les humains pourraient bien vivre ! Quand des enfants réfléchissent de cette façon sur des sujets touchant l’éthique et qu’ils ont le souci de l’autocorrection, on peut dire alors qu’ils forment une communauté de recherche éthique.
Apprendre à vivre ensemble est une tâche complexe, car elle suppose le développement d’un ensemble d’attitudes et d’habiletés qui doivent être bien orchestrées pour que l’entreprise réusisse. Dans une communauté de recherche, le but n’est pas de gagner ou de perdre. Le but est de créer un monde commun à la construction duquel chacun pourra participer activement. Pour réaliser un tel projet, il importe que les enfants prennent le temps de s’écouter, de s’entraider, de se respecter, d’agir en toute justice avec le courage et la prudence que cela exige.La présence de tous les autres vient favoriser le développement de ces dispositions en forçant chaque participant à développer ce que les anciens nommaient des vertus.
Et cela peut se produire à tout moment,pendant la lecture,pendant la discussion, ou lors de la cueillette de questions.
La recherche éthique privilégie certains outils de la pensée;
Une forme de recherche fera appel au rapport tout-parties comme au rapport entre les moyens et la fin ; la formulation d’hypothèses fera aussi partie du coffre d’outils des personnes engagées dans une recherche éthique ; l’universalisation, c’est-à-dire la capacité d’entrevoir ce qu’il adviendrait si tout le monde optait pour une position, compte parmi les outils de ce coffre; la recherche de conséquences est peut être au cœur même tous ces outils, tant il semble difficile d’imaginer son absence lorsqu il est question d’une problématique morale; enfin la prise en compte de l’entier du problème est aussi indispensable, car bien souvent les difficultés que nous rencontrons sur le plan éthique tiennent au fait que nous n’avons pas su considérer le problème dans son entier.
Ce ne sonr là que quelques exemples de l’ensemble des outils qui interviennent au moment d’une recherche à caractère éthique. Tous cs outils sont utiles dans une enquête éthique,mais au premier chef, peut être, se trouve la capacité d’imaginer les conséquences de nos actes.
La recherche éthique occupe une place centrale en philosophie. Ainsi des questions comme :
Dans quel sorte de monde voulons-nous vivre ? Comment vivre avec soi et les autres ? Qu’Est-ce que l’amitié, qu’Est-ce l’amour ? Sont des questions quasiment éternelles, qui se reposent de génération en génération et qui hantent l’esprit des philosophes depuis au moins 2500 ans.
Et en présence de ces questions, on pourrait être tenté de transmettre sa morale … de transmettre aux enfants ce qu’on croit bon et juste… mais tel n’est pas le but de la pratique de la philosophie avec les enfants. En outre, la formation éthique qui est en jeu ici n’est pas une formation de la raison qui viendrait contrôler les émotions, mais une formation des émotions afin que l’être humain développent un désir grandissant pour des principes, des raisons qui guident ses actions. Il ne s’agit pas de contrôler les émotions par la raison, mais de redistribuer ces émotions de telle sorte qu’elle s’harmonisent à des désirs visant la
« raisonnablement », la cohérence, l’autocritique et qu’elles permettent de franchir le pas de l’autocorrection, qui est la fin ultime de toute formation éthique. Plus on pourra se corriger soi-même, plus on aura le désire de le faire, plus on pourra entrer en relation authentique avec l’autre. L’enjeu d’une recherche éthique n’est pas de corriger l’autre, mais de se corriger soi-même en vue de pouvoir rencontrer l’autre dans sa différence et sa richesse, par là même qu’il est différent.
C’est de cela, notamment , dont nous avons besoin si nous souhaitons accéder à un jugement raisonnable.Et c’Est-ce qui est en jeu lorsqu’on transforme la classe en communauté de recherche philosophique. Chaque enfant devient un membre actif d’un processus de délibération qui le conduit peu à peu à nuancer son jugement, un jugement pratique dont il a besoin quotidiennement, et dont il aurat toujours besoin, de plus en plus, dans une société démocratique
Une éducation du citoyen
Créer une communauté de recherche avec les enfants, c’est mettre en route un certain nombres d’activités permettant aux enfants de vivre la démocratie à l’école. Le dialogue qui , nous le savons, est au cœur de l’entreprise n’est pas étranger à ce vécu. En effet, par delà le pouvoir du vote dans une démocratie, c’est d’abord la capacité de pouvoir échanger entre nous qui crée une démocratie.. La démocratie passe par le dialogue, et celui-ci nous ouvre la voie d’une éducation à la citoyenneté.
Apprendre à devenir un démocrate ne se résume pas à l’apprentissage du vote. Le vote n’est qu l’aboutissement d’un processus et c’Est-ce processus qui compte par-dessus tout. Axée sur la délibération, la communauté de recherche permet à chaque enfant de développer les habiletés et les attitudes d’une personne raisonnable, qualités indispensables pour tout citoyen vivant dans une démocratie. Apprendre la démocratie, c’est apprendre à vivre avec les autres dans le respect des opinions et des raisons avancées par tous et chacun. Si la recherche de consensus n’est pas l’ultime but d’une communauté de recherche, il peut arriver que, par moments, des compromis soient nécessaires.
Dans une communauté de recherche, chacun participe au développement de la structure sociale démocratique.Le partage cognitif qui se réalise alors ressemble à celui que nous pourrions avoir si nous nous engagions dans un long processus de réflexion personnelle. Dans un tel cadre, on s’engagera dans une série d’activités mentales afin de pénétrer et d’analyser notre sujet de réflexion On s’étonnera, on questionnera, on fera des inférences, on définira on tentera de dégager des présupposé, etc… Dans une communauté de recherche, il se passe la même chose, mais chacun des aspects est pris en chage par l’un ou l’autre des participants. Ainsi l’un posera une question, un autre formulera une partie du problème qui sera alors repris par l’intervenant suivant, un autre encore signalera la présence d’un présupposé avec lequel il n’est pas d’accord. Il se forme alors une pensée que Lipman qualifie de distributive (le travail cognitif est distribué entre tous ) et que chaque enfant de la classe, du fait qu’il y participe intériorise peu à peu. Parce qu’il est compris dans le même espace qu’elle; l’enfant fait partie de la communauté de recherche ; parce qu’il pense avec elle, et surtout par un processus d’intériorisation, c’est peu à peu la communauté de recherche qui fait partie de lui.
Comment pouvons nous et surtout devons nous vivre ensemble dans la cité est une question essentielle qui hante l’esprit de l’être humain depuis fort longtemps, peut être depuis le début. Et elle devient d’autant plus pressante que la vie se complexifie et que les réponses, autrefois fournies par la religion et la politique, semblent parfois faire défaut. En philosophie pour les enfants, rien n’est donné d’avance dans une sorte de vision descendante, selon laquelle il y aurait une réponse déterminé d’en haut à laquelle nous devrions arriver, une réponse immuable, qui finirait par s ‘imposer à la conscience comme aux conduites humaines. Il s’agit plutôt d’une vision ascendante, selon laquelle, au contraire, tout se joue, se discute et se rediscute à partir de la base. Chemin faisant, cette vision permet cependant de former de citoyen raisonnable.
Créer une communauté de recherche, c’est bâtir une société où chacun, peu à peu, fois après fois, sent de plus en plus l’importance de créer un monde où chacun trouve sa place dans le rapport qu’il entretient avec les autres. C’est le monde, dirait Lipmann nous permettant de franchir l’abîme entre l’étonnement et la réflexion, entre la réflexion et le dialogue, entre le dialogue et l’expérience.
Toute démocratie suppose la présence de personnes raisonnables. Etre raisonnable ne se réduit pas à être rationnel. Etre raisonnable, c’est faire preuve d’une rationalité tempérée par le jugement qui rend nos paroles et nos actes de plus en plus appropriées. Le jugement, et surtout le bon jugement , n’est pas chose aisée à produire. On n’a pas besoin d’aller à l’école pour apprendre àbien juger. J’ai un voisin qui n’a guère réquenté l’école, mais qui fait pourtant preuve d’un jugement nuancé; Mais l’école doit aussi participer à la formation de ce jugement, sans quoi elle risque de passer à côté de l’une de ses missions fondamentales : la formation de personnes raisonnables capables de vivre dans une démocratie digne de ce nom.
À l’école on devrait se demander où, quand, comment et par qui se fait la formation du jugement. Car il s’agit là d’une des assises fondamentales de la conscience, de la personne, de la conduite de la vie, de la démocratie et des rapports humains de tous ordres.
Quand on aura admis la nécessité de travailler à la formation du petit de l’être humain en tant que personne, on reconnaîtra du même coup la pertinence de la philosophie pour les enfants. Cette approche sera alors considérée très sérieusement, car on reconnaîtra en elle un instrument approprié pour les buts poursuivis : la formation d’une personne, d’un sujet pensant, agissant, autonome et capable de vivre dans une société démocratique, libérée des chaînes du totalitarisme de ceux qui veulent faire croire qu’une personne éduquée se mesure par la somme des certitudes qu’elle possède, qu’il n’y a qu’un seul point de vue qui doit être retenu, parce que vrai, c’est-à-dire le leur.
Il faudra d’abord supposer que l’éxpansion de la démocratie exige une éducation à la démocratie. Ainsi, on sera peut être mieux préparer à reconnaître alors que l’approche de la philosophie représente un instrument extraordinaire en éducation, parce qu’elle est essentiellement une pratique continue de la démocratie à l’école.
Mais il faudra aussi accepter, comme la charte des droits de l’enfant le stipule, que l’enfant a un droit de parole et la liberté de penser.
Quels sont les moyens actuels pour développer cette activité ?
Avec 3 années de pratique d’ateliers philo nommés les « Jeux-Philo » à la bibliothèque de Huningue et plusieurs formations pratique dont une via internet avec l’université Laval du Québec, je me propose comme intervenant externe d’animer des ateliers philo de 1x par semaine dans une classe
Qu’est-ce faire de la philosophie avec les enfants ?
Comment se passe une séance de philosophie avec les enfants ?
Qu’apprennent-ils lors d’une Communauté de Recherche Philo. ?
( habiletés et dispositions)
Quels sont les enjeux de cette pratique philosophique ?
Quels sont les moyens actuels pour développer cette pratique ?
Les enfants possèdent des habiletés naturelles à philosopher,
Comme l’étonnement, la curiosité, ils réfléchissent …
La philosophie peut-elle leur permettre de développer leurs capacités à réfléchir, à analyser à comparer, à critiquer ( passer au crible), à justifier et à étoffer leurs arguments, à se soucier des autres et à se dépasser ?
Car apprendre à penser ( de plus en plus juste) est fondamental.
L’excellence de la pensée, facteur de réussite sociale et de bonheur individuel est le meilleur garant de la qualité de la vie et de la démocratie.
Et le citoyen se forme dès la prime enfance.
Qu’Est-ce faire de la philosophie avec les enfants ?
Qui d’entre vous , parents, enseignants, animateurs, éducateurs n’a pas entendu une question d’enfants et d’adolescents ?
Quelques exemples :
- Quand je serai grande, je pourrai penser comme je veux ?
- Où va-t-on aprés la mort ?
-
La philosophie consiste à poser,d’une manière honnête et vraie, les questions les plus simples sur ce qu’il convient d’appeler le sens de la vie, les questions de tout le monde.
Les enfants sont naturellement philosophes; par l’étonnement, base de la philosophie,par leur questionnement, leur curiosité.
Encore faut-il ne pas étouffer dans l’œuf cette soif de savoir, de comprendre ; notre vie actuelle ne nous donne pas toujours le temps de chercher , de trouver des réponses quand il y en a..
On ne sait pas comment s’y prendre avec leurs questions qui peuvent nous désarçonnées
La philosophie, est une passerelle pour accompagner les enfants non seulement dans leurs questionnements mais aussi dans leur formation du jugement, càd discerner correctement ce qui est juste de ce qui ne l’est pas. Cette compréhension présuppose la capacité de bien penser, de délibérer.
C’est l’objectif premier de la philosophie pour enfants telle qu’elle a été développée aux Etats-Unis par Matthew Lipman dans les années 70,
Le développement de la pensée critique, le fait de pouvoir penser par soi-même et de bien penser, càd la formation d’une jugement autonome, à partir de critères réfléchis .
Comment se passe une séance de philosophie avec les enfants ?
Qu’Est-ce qu’une Communauté de Recherche Philosophique ?
Faire de la philosophie avec les enfants consiste d’abord à transformer la classe en communauté de recherche où la parole est d’abord et avant tout donné aux enfants. On y entendra des enfants ou des adolescents qui se parlent. Cependant, il n’est pas rare aujourd’hui d’entrer dans une école et d’y voir des jeunes en train de se parler à propos d’un sujet qui les intéresse. Et on ne dira pas pour autant qu’ils sont en train de transformer leur classe en communauté de recherche.
A première vue, donc rien de neuf sous le soleil, puisque certains affirment qu’ils le font déjà.
Facile à accomplir aussi, car inviter les enfants à parler, c’est répondre à l’un de leurs désirs fondamentaux. Les enfants aiment parler, aiment se dire entre eux des choses qui les intéressent. Cela semble d’ailleurs répondre à un désir humain largement partagé: celui d’échanger, d’interagir avec d’autres humains dans un contexte où le sens, la signification, devient de plus en plus un élément clef pour comprendre ce qui s’y passe. Pas étonnant que les enfants comme les adultes, aient un goût si développé pour se dire des choses entre eux, lorsqu’on songe au fait que le pouvoir de parler avec d’autres êtres humains, c’est le pouvoir de comprendre et de partager le sens que l’on donne à son existence.
Encore faut-il voir ce qui se cache sous la surface de l’ « aimer parler ensemble »
Quand on est devant une communauté de recherche et qu’on décide de dépasser ce premier temps de l’observation , on découvre une structure, un ensemble de relations, d’outils, de moyens permettant d’atteindre des objectifs bien précis.Ces objectifs, à leur tour, sont déterminés par un but ultime : celui d’aider les enfants à développer leur habileté à juger d’une manière raisonnable, d’une manière à la fois critique et créatrice.
Rien de banal, rien de facile non plus, car si cette transformation répond à un désir profond des enfants, encore faut-il ajouter quelle implique l’engagement de personnes en train d’intérioriser une multiplicité d’habiletés cognitives _ habileté à raisonner, à rechercher, à organiser l’information, à traduire _ et un ensemble de dispositions affectives comme le respect, l’écoute, l’entraide, la collaboration , etc dont le nombre, la complexité et l’orchestration apparaissent pourtant nécessaire si on souhaite réaliser de plus en plus pleinement le but poursuivi :
Aider les enfants à penser par et pour eux-mêmes.
Premiers moments d’une communauté de recherche
La disposition en cercle permet un meilleur partage de la voix que les rangées de pupitres traditionnelles. Ce partage commence par la lecture d’une histoire philosophique écrite pour les enfants. En lisant une histoire, les enfants découvrent que celle-ci a un sens, est riche de signification . Qui plus est, elle colle à leur réalité, elle offre des idées sur la façon dont-ils peuvent s’y prendre pour donner un sens à leur expérience, elle suggère des questions qui pourront devenir, à l’occasion, les questions des enfants de la classe;
C’est dire, du même coup l’importance que ce programme accorde à la lecture, son rôle premier n’est pas d’amener les enfants à mieux lire
( bien que ce soit là une conséquence inévitable de l’exercice), mais de les conduire à vivre une première situation d’échange, celle de partager un texte, premier pas dans un processus qui, plus tard, les amènera à échanger et à partager leurs questions, leurs idées, leurs points de vue et leurs sentiments à propos d’une question ou d’un problème que la lecture du texte aura suscité.
La cueillette de questions.
Une fois la lecture terminée, les enfants sont invités à formuler les questions que la lecture a pu susciter. Ce sont les enfants qui donnent le point de départ de l’enquête par les questions qu’ils posent. Partant de l’intérêt des enfants, ces questions traduisent aussi leurs ignorance, leur étonnement. Pratiquer la philosophie avec les enfants, c’est ouvrir la porte à l’étonnement, à la reconnaissance de sa propre ignorance parce qu’on est faillible, au besoin d’aide qu’on pourrait avoir et à l’aide qu’on pourrait offrir en participant à la construction du projet. L’animatrice prendra soin d’inscrire les questions des enfants au tableau. Ele aura le souci d’inscrire le nom de l’enfant qui a posé la question .
La question, pont de départ de la rencontre, est un élément pédagogique fondamental dans la pratique de la philosophie avec les enfants. Les guides pédagogiques qui accompagnent chacun des romans présentent deux composantes principales : les plans de discussion (qui servent principalement à la clarification de concepts) et les exercices ( qui visent le développement d’habiletés intellectuelles ). L’unité de base dans les deux cas est la question. Or, certaines des questions que nous posons ne visent pas simplement à trouver des réponses, mais aussi et peut être surtout à connaître l’ampleur du problème quelles sous tendent. La question de départ est donc l’occasion d’engager les enfants dans une pratique dirigée visant à découvrir, dans une zone particulière de la réalité, le ou les problèmes quelle sous-tend.
La discussion
Les idées et questions sont retenues en raison de leur importance significative pour les enfants. La cueillette d’idée _ la mise sur pied de l’ordre du jour _ est une œuvre collective appelant chaque participant à exposer aux autres soit l’idée, soit le thème, le passage ou la question qui présente un intérêt à ses yeux. Chacun de ces éléments formera un pont entre les intérêts des enfants et les différentes pistes de recherche que proposeront les plans de discussion au moment où ils seront introduits dans la troisième partie du processus : la discussion en communauté de recherche.
Enfin, les enfants s’engagent dans la discussion de l’un, de plusieurs ou de l’ensemble des thèmes, questions ou problèmes qu’ils ont choisis d’investiguer. La pratique de la philosophie avec les enfants permet de développer les habiletés de pensée de ces derniers; Elle leur offre la possibilité de réfléchir philosophiquement à des idées qui les intéressent dans le cadre d’une recherche commune fondée sur la coopération et le dialogue.
Mais ce processus ne se résume pas uniquement à l’exercice des habiletés intellectuelles. En effet, le dialogue suscite une dynamique permettant la création d’une communauté de recherche, laquelle favorise une prise de conscience de ses propres sentiments et de ceux des autres, un accroissement de la sensibilité aux relations interpersonnelles et l’acquisition d’un juste sens des proportions conduisant à faire la part des choses entre ses propres besoins et aspirations et ceux des autres. La discussion est donc un lieu où s’intègrent des apprentissages qui sont de l’ordre du savoir (le sujet de discussion ) du savoir-faire ( les habiletés de pensée ) et du savoir-être ( les attitudes permettant l’émergence de l’impartialité, de l’objectivité, de l’écoute attentive …).
Le rôle de l’animateur
Au moment de créer une communauté de recherche avec les enfants, le rôle de l’animateur n’est pas de fournir l’information ni de produire la
« bonne » opinion ou interprétation. Cette non-directive quant au choix des idées à discuter et au contenu de la discussion vise à assurer que les thèmes choisis correspondent adéquatement aux intérêts des enfants, et non à ceux de la personne qui anime la communauté de recherche. Elle vise ainsi à le prémunir de toute tentation visant à endoctriner les enfants.
La réflexion philosophique concerne d’abord l’émergence d’un questionnement et le dévoilement d’aspects permettant de mieux comprendre le réel, l’existence, le savoir lui-même, l’humain. Elle n’a pas à fournir de réponses toutes faites.
Mais puisque la discussion ne se résume pas simplement à la mise en commun d’opinions et qu’elle vise surtout à enrichir les opinions exprimées, à rechercher la complémentarité des points de vue, à découvrir les idées qui se cachent sous certaines expressions, à clarifier le sens d’une tentative infructueuse, à s’exercer à l’expression d’une pensée à la fois convergente et divergente, à fonder nos représentations,
Il incombe à l’animateur de prendre la responsabilité de créer des initiatives qui guideront et donneront une certaine direction à la recherche afin qu’elle se réalise d’une façon raisonnée qui soit de plus en plus productive et de plus en plus autocorrective. Dans cet ordre d’idées, un certain nombre de stratégies pédagogiques _ qui relèvent aussi de la méthodologie philosophique _ peuvent être utilisées par la personne qui facilite la discussion philosophique dans une comunauté de recherche. Ces outils sont acquis lors de la formation .
Qu’apprennent les enfants lors d’unecommunauté de recherche Philo. ? ( habiletés et dispositions)
Habiletés cognitives
Le programme de philosophie pour les enfants ne cherche pas à favoriser le développement d’une habileté de la pensée au détriment des autres. Car c’est l’excellence dans la pensée qui est visée . Or, celle-ci n’est pas l’affaire d’une habileté en particulier, mais de son emploi approprié. Par conséquent, toutes les habiletés de la pensée doivent être introduites dans un programme visant le développement intellectuel. Chacun peut , à sa manière, si elle est bien employé au moment qui convient, servir pour atteindre cette excellence.
De plus, même si la liste des différentes habiletés intellectuelles semble sans fin et comporter une part d’arbitraire, il est tout de même possible d’en saisir les racines en dégageant ce qui paraît constituer des processus intégrateurs : raisonner, recherche, définir et traduire.
Raisonner
Si on apprend à penser en pensant, de même on apprend à raisonner en raisonnant. Lorsque les enfants sont engagés dans la discussion, ils sont invités à produire un ensemble de raisonnement qui feront l’bjet d’une évaluation constante par l’animateur, par l’enseignant, afin de déceler les éléments du raisonnement qui semblent défectueux et qui mériteraient un exament plus aprofondi . Pour aider l’enseignant dans cette démarche, le programme lui fournit un guide pédagogique remplis d »exercice visant le raffinement de l’activité de raisonner, tels que : l’inférence immédiate,
La conversion, l’inclusion, l’exclusion: la relation entre tout et seulement; le carré d’opposition etc…
En outre, ces guides pédagogiques proposent une série d’exercice permettant de pratiquer un ensemble d’habiletés logiques qu’il faudrait qualifier ici d’informelles : l’ambiguité sémantique, syntaxique; la métaphore; le raisonnement analogique; l’induction; la généralisation ; les présupposés; la classification; différence de degré, de nature; la définition; l’utilisation de l’exemple et du contre exemple; raison et conclusion ; raison et croyance; raison et excuse, raison et but ;les bonnes raisons, les sophismes, l’appel à l’autorité; la flatterie etc…
Toutes ces activités feront l’objet d’une pratique et d’une évaluation qui permettront de corriger le tir au besoin. Elles pourront ainsi, être intériorisées et constituer une seconde nature pour la personne qui les exerce et les maîtrise.
Rechercher
Lorsque les enfants font de la philosophie, leur activité ne se résume pas à raisonner. En effet, au sein d’une communauté d’enquête, leur activité de raisonner s’inscrit dans un mouvement plus large qui st celui de la recherche.Dans le 1er chapitre du 1er roman écrit par Lipman , on y découvre le paradigme (base ) des différentes étapes du processus d’enquête : Harry, le personnage principal du roman éprouve une difficulté ; puis il se met à douter ; il définit le problème qui le tracasse ; il formule une hypothèse permettant de solutionner ce problème ; il met en évidence les conséquences de cette solution sur le plan théorique ; il découvre un contre-exemple qui remet en cause la solution qu’il avait imaginé ; il révise son hypothèse afin de tenir compte des nouveaux faits observés ; il applique finalement son hypothèse révisée à une situation particulière. Chacune de ces étapes est reprise dans l’histoire et appliquée à des situations différentes ,invite les enfants qui la lisent à définir des problèmes, à formuler des hypothèses à imaginer des contre exemples, à dégager des conséquences, en somme à s’exercer aux procédures de la recherche.
Définir
Les philosophes cherchent à préciser le sens des critères qui gouvernent nos actions, nos discours, nos productions. Ils sont particulièrement intéressés à clarifier et à élucider des questions controversées. Or ce faisant, la philosophie propose un ensemble d’idées et de problèmes fondamentaux qui présentent un intérêt considérable aux yeux de ceux qui envisagent de les définir. Et cet intérêt est extrêmement important. Il est un des facteurs qui expliquent la pertinence de la philosophie dans un effort visant l’amélioration de cette habileté qui consiste à organiser l’information, à analyser les objets de notre pensée, en un mot à définir.
En effet la pratique de l’art de définir ne peut suffire pour transformer des personnes qui pensent en des personnes qui pensent bien. Encore faut-il qu’elles pensent à propos de sujets qui présentent une importance à leurs yeux.Si tel n’est pas le cas, non seulement, elles ne seront pas motivés à s ‘engager dans la pratique des habiletés particulières qui sont en jeu ( catégoriser, diviser, distinguer, exemplifier etc…), mais en plus, elles risquent de demeurer avec l’impression, si jamais elles s »engagent à les pratiquer, que ces habiletés peuvent servir à tout et à n’importe quoi et qu’au fond elles ne mènent à rien.
Traduire
Une pensée de qualité supérieure implique la capacité de compréhension.
Puisque le développement de cette pensée se réalise, du moins en philosophie pour les enfants, au sein d’un dialogie, il sera important que chaque interlocuteur puisse traduire en ses propres mots ce qu’il entend de la bouche des autres participants. La traduction, l’interprétation, rend celui ou celle qui pense plus apte à saisir dans ses propres termes ce qui est pensé. Dans la mesure où chaque personnellement son propre langage, l’opération de traduction s’avère indispensable et lui offre la possibilité de mieux comprendre n’importe quel écrit ou communication verbale en facilitant la conversion de cette communication dans des mots, des termes, des expressions et des structures de son langage.
Les processus en jeu dans la traduction sont essentiellement au nombre de deux : le raisonnement analogique et la standardisation.
Une analogie est une ressemblance entre deux relations. Par conséquent, celui qui est capable de construire et de critiquer des analogies devrait posséder la compréhension de reconnaître des ressemblances entre ds passages littéraires différents, ou encore entre des structures langières différents. De son coté, la standardisation permettrait de reconnaître diverses expressions comme étant des façons différents d’exprimer la même chose;
Dispositions
Les dispositions pourraient être définies comme des réponses individuelles aux qualités des interactions sociales qui ont cours dans une situation de groupe. Et devant ces qualités, deux choix sont possibles : ou bien la personne intériorise ces qualités ou bien elle développe une attitude négative à leur endroit. Intérioriser les qualités d’une communauté de recherche, c’est s’engager de plus en plus à s’étonner, à être inquisiteur, à être critique, à interroger les possibles, à prendre soin des outils d’enquête, à coopérer intellectuellement, à respecter les autres et à sentir un désir pour des principes, des idéaux, des raisons,des explications.
Ces dispositions nomment des manières d’être avec les autres et avec soi-même.
Quels sont les enjeux de cette pratique philosophique ?
Au niveau de l’enfant
Dans la pratique de la philosophie avec les enfants se dégage l’idée que la formation de la personne passe aussi par la formation de la pensée et que celle-ci ne saurait s’accomplir sans qu’on prenne le temps d’engager les enfants dans le processus qui la caractérise essentiellement : la recherche . Un enseignement qui viserait uniquement à transmettre les résultats du savoir et qui oublierait d’engager les enfants dans le processus menant à ces résultats est un vain effort.
Si on veut conduire les enfants à mieux penser (pas seulement plus, mais mieux), si on accepte l’idée que l’objectif de l’éducation est de rendre les enfants capables de penser par et pour eux-mêmes, alors il importe qu’ils s’engagent personnellement dans l’acte de penser et construisent ainsi, avec le temps et la répétition, la puissance de produire eux-mêmes les résultats. Comme on apprend à marcher en marchant, on apprend à penser en pensant. Dans les deux cas, ce qui est central, c’est le mouvement.
Un mouvement, dira Lipman, ressemblant à celui du voilier qui, naviguant d’une rive à l’autre, progresse vers sa destination finale.
L’intérêt de cette métaphore tient en partie dans l’idée que la pensée d’un enfant, comme celle de tout être humain, bien qu’essentiellement libre, ne l’est pas entièrement. Losqu’on conduit les enfants à s’engager dans un processus de recherche, on les invite du même coup à tenir compte des vents et marées qui sont le lot de tout processus de recherche. En outre, l’important ici n’est pas tant la destination que le voyage lui-même, car c’est surtout par lui qu’on apprend.
Ce qu’on y apprend, c’est le pouvoir de naviguer de plus en plus habilement dans des conditions inattendues qui, pour être affrontés avec succès, exigent la présence d’un navigateur sachant faire preuve d’un jugement approprié.
C’est pour cela, aussi et peut être surtout que les voyages forment la jeunesse.
La recherche éthique
( l’éthique : vision d’une manière de vivre ou de faire qui soit bonne , heureuse )
Les enfants sont préoccupés par des questions qui touchent leur manière de vivre ensemble. Ils ne veulent pas seulement savoir dans quel monde ils vivent. Ils sont aussi préoccupés de savoir dans quelle sorte monde de monde il ferait non vivre. Une communauté de recherche st n lieu où nous apprenons à vivre ensemble et un lieu où il fait bon vivre.
L’enquête éthique porte principalement sur cette question fondamentale :
Dans quel sorte de monde voulons-nous vivre ?
Qu’avons-nous besoin de faire et qu’avons- nous le droit de faire pour qu’un tel monde advienne ? En philosophie pour les enfants, la recherche éthique ne se fait pas en solitaire. Inscrite dans une communauté de recherche, elle s’effectue en lien avec d’autres personnes qui partagent des objectifs similaires, qui échangent de l’information, qui respectent le point de vue et les opinions d’autrui et qui ont envie de construire une conception raisonnable des modes de vie, une conception dont on puisse dire : ah voici comment les humains pourraient bien vivre ! Quand des enfants réfléchissent de cette façon sur des sujets touchant l’éthique et qu’ils ont le souci de l’autocorrection, on peut dire alors qu’ils forment une communauté de recherche éthique.
Apprendre à vivre ensemble est une tâche complexe, car elle suppose le développement d’un ensemble d’attitudes et d’habiletés qui doivent être bien orchestrées pour que l’entreprise réusisse. Dans une communauté de recherche, le but n’est pas de gagner ou de perdre. Le but est de créer un monde commun à la construction duquel chacun pourra participer activement. Pour réaliser un tel projet, il importe que les enfants prennent le temps de s’écouter, de s’entraider, de se respecter, d’agir en toute justice avec le courage et la prudence que cela exige.La présence de tous les autres vient favoriser le développement de ces dispositions en forçant chaque participant à développer ce que les anciens nommaient des vertus.
Et cela peut se produire à tout moment,pendant la lecture,pendant la discussion, ou lors de la cueillette de questions.
La recherche éthique privilégie certains outils de la pensée;
Une forme de recherche fera appel au rapport tout-parties comme au rapport entre les moyens et la fin ; la formulation d’hypothèses fera aussi partie du coffre d’outils des personnes engagées dans une recherche éthique ; l’universalisation, c’est-à-dire la capacité d’entrevoir ce qu’il adviendrait si tout le monde optait pour une position, compte parmi les outils de ce coffre; la recherche de conséquences est peut être au cœur même tous ces outils, tant il semble difficile d’imaginer son absence lorsqu il est question d’une problématique morale; enfin la prise en compte de l’entier du problème est aussi indispensable, car bien souvent les difficultés que nous rencontrons sur le plan éthique tiennent au fait que nous n’avons pas su considérer le problème dans son entier.
Ce ne sonr là que quelques exemples de l’ensemble des outils qui interviennent au moment d’une recherche à caractère éthique. Tous cs outils sont utiles dans une enquête éthique,mais au premier chef, peut être, se trouve la capacité d’imaginer les conséquences de nos actes.
La recherche éthique occupe une place centrale en philosophie. Ainsi des questions comme :
Dans quel sorte de monde voulons-nous vivre ? Comment vivre avec soi et les autres ? Qu’Est-ce que l’amitié, qu’Est-ce l’amour ? Sont des questions quasiment éternelles, qui se reposent de génération en génération et qui hantent l’esprit des philosophes depuis au moins 2500 ans.
Et en présence de ces questions, on pourrait être tenté de transmettre sa morale … de transmettre aux enfants ce qu’on croit bon et juste… mais tel n’est pas le but de la pratique de la philosophie avec les enfants. En outre, la formation éthique qui est en jeu ici n’est pas une formation de la raison qui viendrait contrôler les émotions, mais une formation des émotions afin que l’être humain développent un désir grandissant pour des principes, des raisons qui guident ses actions. Il ne s’agit pas de contrôler les émotions par la raison, mais de redistribuer ces émotions de telle sorte qu’elle s’harmonisent à des désirs visant la
« raisonnablement », la cohérence, l’autocritique et qu’elles permettent de franchir le pas de l’autocorrection, qui est la fin ultime de toute formation éthique. Plus on pourra se corriger soi-même, plus on aura le désire de le faire, plus on pourra entrer en relation authentique avec l’autre. L’enjeu d’une recherche éthique n’est pas de corriger l’autre, mais de se corriger soi-même en vue de pouvoir rencontrer l’autre dans sa différence et sa richesse, par là même qu’il est différent.
C’est de cela, notamment , dont nous avons besoin si nous souhaitons accéder à un jugement raisonnable.Et c’Est-ce qui est en jeu lorsqu’on transforme la classe en communauté de recherche philosophique. Chaque enfant devient un membre actif d’un processus de délibération qui le conduit peu à peu à nuancer son jugement, un jugement pratique dont il a besoin quotidiennement, et dont il aurat toujours besoin, de plus en plus, dans une société démocratique
Une éducation du citoyen
Créer une communauté de recherche avec les enfants, c’est mettre en route un certain nombres d’activités permettant aux enfants de vivre la démocratie à l’école. Le dialogue qui , nous le savons, est au cœur de l’entreprise n’est pas étranger à ce vécu. En effet, par delà le pouvoir du vote dans une démocratie, c’est d’abord la capacité de pouvoir échanger entre nous qui crée une démocratie.. La démocratie passe par le dialogue, et celui-ci nous ouvre la voie d’une éducation à la citoyenneté.
Apprendre à devenir un démocrate ne se résume pas à l’apprentissage du vote. Le vote n’est qu l’aboutissement d’un processus et c’Est-ce processus qui compte par-dessus tout. Axée sur la délibération, la communauté de recherche permet à chaque enfant de développer les habiletés et les attitudes d’une personne raisonnable, qualités indispensables pour tout citoyen vivant dans une démocratie. Apprendre la démocratie, c’est apprendre à vivre avec les autres dans le respect des opinions et des raisons avancées par tous et chacun. Si la recherche de consensus n’est pas l’ultime but d’une communauté de recherche, il peut arriver que, par moments, des compromis soient nécessaires.
Dans une communauté de recherche, chacun participe au développement de la structure sociale démocratique.Le partage cognitif qui se réalise alors ressemble à celui que nous pourrions avoir si nous nous engagions dans un long processus de réflexion personnelle. Dans un tel cadre, on s’engagera dans une série d’activités mentales afin de pénétrer et d’analyser notre sujet de réflexion On s’étonnera, on questionnera, on fera des inférences, on définira on tentera de dégager des présupposé, etc… Dans une communauté de recherche, il se passe la même chose, mais chacun des aspects est pris en chage par l’un ou l’autre des participants. Ainsi l’un posera une question, un autre formulera une partie du problème qui sera alors repris par l’intervenant suivant, un autre encore signalera la présence d’un présupposé avec lequel il n’est pas d’accord. Il se forme alors une pensée que Lipman qualifie de distributive (le travail cognitif est distribué entre tous ) et que chaque enfant de la classe, du fait qu’il y participe intériorise peu à peu. Parce qu’il est compris dans le même espace qu’elle; l’enfant fait partie de la communauté de recherche ; parce qu’il pense avec elle, et surtout par un processus d’intériorisation, c’est peu à peu la communauté de recherche qui fait partie de lui.
Comment pouvons nous et surtout devons nous vivre ensemble dans la cité est une question essentielle qui hante l’esprit de l’être humain depuis fort longtemps, peut être depuis le début. Et elle devient d’autant plus pressante que la vie se complexifie et que les réponses, autrefois fournies par la religion et la politique, semblent parfois faire défaut. En philosophie pour les enfants, rien n’est donné d’avance dans une sorte de vision descendante, selon laquelle il y aurait une réponse déterminé d’en haut à laquelle nous devrions arriver, une réponse immuable, qui finirait par s ‘imposer à la conscience comme aux conduites humaines. Il s’agit plutôt d’une vision ascendante, selon laquelle, au contraire, tout se joue, se discute et se rediscute à partir de la base. Chemin faisant, cette vision permet cependant de former de citoyen raisonnable.
Créer une communauté de recherche, c’est bâtir une société où chacun, peu à peu, fois après fois, sent de plus en plus l’importance de créer un monde où chacun trouve sa place dans le rapport qu’il entretient avec les autres. C’est le monde, dirait Lipmann nous permettant de franchir l’abîme entre l’étonnement et la réflexion, entre la réflexion et le dialogue, entre le dialogue et l’expérience.
Toute démocratie suppose la présence de personnes raisonnables. Etre raisonnable ne se réduit pas à être rationnel. Etre raisonnable, c’est faire preuve d’une rationalité tempérée par le jugement qui rend nos paroles et nos actes de plus en plus appropriées. Le jugement, et surtout le bon jugement , n’est pas chose aisée à produire. On n’a pas besoin d’aller à l’école pour apprendre àbien juger. J’ai un voisin qui n’a guère réquenté l’école, mais qui fait pourtant preuve d’un jugement nuancé; Mais l’école doit aussi participer à la formation de ce jugement, sans quoi elle risque de passer à côté de l’une de ses missions fondamentales : la formation de personnes raisonnables capables de vivre dans une démocratie digne de ce nom.
À l’école on devrait se demander où, quand, comment et par qui se fait la formation du jugement. Car il s’agit là d’une des assises fondamentales de la conscience, de la personne, de la conduite de la vie, de la démocratie et des rapports humains de tous ordres.
Quand on aura admis la nécessité de travailler à la formation du petit de l’être humain en tant que personne, on reconnaîtra du même coup la pertinence de la philosophie pour les enfants. Cette approche sera alors considérée très sérieusement, car on reconnaîtra en elle un instrument approprié pour les buts poursuivis : la formation d’une personne, d’un sujet pensant, agissant, autonome et capable de vivre dans une société démocratique, libérée des chaînes du totalitarisme de ceux qui veulent faire croire qu’une personne éduquée se mesure par la somme des certitudes qu’elle possède, qu’il n’y a qu’un seul point de vue qui doit être retenu, parce que vrai, c’est-à-dire le leur.
Il faudra d’abord supposer que l’éxpansion de la démocratie exige une éducation à la démocratie. Ainsi, on sera peut être mieux préparer à reconnaître alors que l’approche de la philosophie représente un instrument extraordinaire en éducation, parce qu’elle est essentiellement une pratique continue de la démocratie à l’école.
Mais il faudra aussi accepter, comme la charte des droits de l’enfant le stipule, que l’enfant a un droit de parole et la liberté de penser.
Quels sont les moyens actuels pour développer cette activité ?
Avec 3 années de pratique d’ateliers philo nommés les « Jeux-Philo » à la bibliothèque de Huningue et plusieurs formations pratique dont une via internet avec l’université Laval du Québec, je me propose comme intervenant externe d’animer des ateliers philo de 1x par semaine dans une classe
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